Il paraît évident que les organisations soient conçues pour de rationaliser l'action collective, ce qui dans l'usage courant qui est fait de ce verbe, signifie réallouer les ressources, éliminer les doublons, etc. en vue d'une plus grande efficience. Cette lecture «gestionnaire» pourrait laisser penser que l'irrationnel dans les organisations n'est que le résidu provisoire d'un travail de rationalisation toujours à reprendre du fait des évolutions de l'environnement ou des «dérives» (Pesqueux & Triboulois, 2004) propres à l'action collective. Notre hypothèse est, au contraire, que tout phénomène organisationnel sans exception, est fondé sur une part d'irrationnel. Pour expliciter notre hypothèse, nous allons procéder en trois étapes. Une première étape, conceptuelle, vise à clarifier la position de l'irrationnel par rapport aux rationalités dont fait partie la raison organisationnelle. Une seconde étape, plus empirique, reprend les résultats et propositions issues de différentes disciplines susceptibles de rendre intelligible l'irrationalité des actions et représentations organisationnelles. Ce chemin se termine, dans un troisième temps, par une brève typologie des manifestations les plus communes de l'irrationalisme organisationnel réactif.