On ressemble beaucoup chez Marivaux. On pourrait même parler d’une véritable prolifération des relations de ressemblance tant les impressions de « déjà-vu » qui parcourent le texte marivaudien se situent à des niveaux multiples de sa création. Le type de ressemblance auquel l’on s’intéresse plus particulièrement dans cette étude peut se formaliser de la manière suivante: un personnage (le plus souvent féminin) s’émerveille d’une forte ressemblance liant son interlocuteur à un amant mort ou disparu. Pour approcher ce qui se profile à l’horizon de ces insistantes ressemblances, on s’efforce de distinguer leurs différents points d’articulation au registre de l’imaginaire : on envisage successivement la ressemblance comme catégorie esthétique fondamentale dans le vocabulaire du portrait, comme faux-semblant sous les espèces du leurre, comme hallucination sous le signe de la chimère, comme transfert sous la forme du quiproquo, et enfin comme repli de l’imaginaire, dans le registre du fantasme : s’inspirant à la fois de la scène de l’aveu à Hippolyte dans la Phèdre de Racine et du trouble de Calypso devant le fils d’Ulysse dans le Télémaque de Fénelon, Marivaux exploite ce motif de la ressemblance comme un moyen de déceler la composante secrètement incestueuse du désir amoureux.