Dans le contexte de la définition du champ de la géométrie pure au cours la première moitié du 19e siècle, un certain nombre de mathématiciens tentent au contraire de donner un sens géométrique aux expressions « élément à l’infini » et « élément imaginaire ». De la même manière que la locution « à l’infini » sert à décrire la disparition de certains éléments d’une figure lorsque l’évolution de celle-ci les entraîne à s’éloigner indéfiniment , le terme « imaginaire » permet de décrire la disparition d’un élément au cours d’une évolution d’une figure dans un domaine fini. Ce chapitre est consacré à la manière dont quatre géomètres de cette tradition ont défini, présenté et justifié, chacun à leur manière, l’usage de ces expressions pour décrire des situations dans le cadre d’une géométrie réelle. Lazare Carnot intègre la réflexion sur les imaginaires dans des considérations générales sur les corrélations en distinguant les corrélations directes par lesquelles les positions mutuelles des éléments d’une figure restent identiques, les corrélations indirectes qui ces dernières changent et enfin les corrélations imaginaires qui rassemblent les cas où des éléments d’une figure ont disparu. Jean Victor Poncelet justifie l’usage des éléments à l’infini ou des éléments imaginaires par le principe de continuité. Michel Chasles développe une théorie justifiant l’utilisation des éléments imaginaires en géométrie à partir de considérations sur le signe des quantités géométriques (longueurs et angles) . Enfin, von Staudt donne un véritable fondement à la notion d’élément imaginaire à partir de considérations de pure incidence.