Notre rencontre avec l’approche énactive comme nos perspectives de recherches en STAPS ont été impulsées par des insatisfactions issues du terrain de la formation en volley-ball. Nous étions (et restons) confrontés à l’importante variabilité interindividuelle de la « présence active » des pratiquants et de leurs apprentissages : certains progressent rapidement, d’autres quasiment pas. Les critères classiquement avancés (qualités physiques, âge, temps passé à s’exercer, adresse spécifique, motivation affichée) ne rendent pas compte de ces différences repérables dans divers contextes (enseignement scolaire obligatoire et optionnel ; secteur associatif). Cette insatisfaction éthique a généré une question de recherche visant à comprendre les raisons de la diversité des pratiques et à envisager une formation réduisant les inégalités d’apprentissage. La préoccupation permanente de formation et l’évolution du travail de terrain ont donné lieu à des problématisations et interprétations successives (Récopé, ibid.), régulièrement amendées jusqu’à la forme provisoire ici exposée à l’adresse de l’énaction, une phénoménologie qui s’efforce de saisir l’expérience humaine pour remédier à l’absence de sens commun dans la définition de la cognition (Varela, 1989). Ce processus nous a éloignés d’une inscription doctrinaire et nous a conduits vers une position à la fois critique et radicale. Notre appropriation de l’énaction est marquée par son caractère hybride : elle aboutit à une anthropologie cognitive non mentaliste empruntant à des philosophies de la vie formant un ensemble d’orientations composites mais compatibles. Elle procède d’une éthologie phénoménologique des pratiques humaines ordinaires, perspective descriptive et comparative des actes s’intéressant aux relations signifiantes avec le monde naturel spécifique (Umwelt), inspirée de Thinès (1980). Nous considérons en effet que les avancées récentes de l’énaction (Di Paolo, 2005) doivent s’enrichir et s’opérationnaliser par le recours aux hypothèses contemporaines de l’approche canguilhemienne (Schwartz, 2011), par les prolongements de l’œuvre merleau-pontyenne (Barbaras, 2008) et par nos propres hypothèses sur la sensibilité à (Récopé, Fache et Fiard, 2011).