Depuis le rapport Brundtland (1987), nombre de rapports ont stigmatisé le caractère néfaste des impacts des activités anthropiques sur l'environnement, conduisant à faire du "développement durable" une préoccupation majeure de nos sociétés. Le projet de la ville durable, tel qu'il figure dans la nouvelle charte d'Athènes, s'inscrit pleinement dans cette direction. En effet, compte tenu de la massification de l'urbanisation qui va de pair avec l'industrialisation et la mondialisation de la société industrielle, la ville est depuis une vingtaine d'années le lieu principal où se pose la question des activités anthropiques et de leurs impacts environnementaux. En Europe, le défi de l'urbanisation contemporaine est l'objet de la charte d'Aalborg adoptée en 1994 lors de la conférence européenne sur les villes durables. Concrètement il porte sur la constitution d'environnements urbains alternatifs. La fabrication et le fonctionnement de dispositifs techniques et spatiaux de l'urbain alternatifs semblent ne pas poser de problème "techniques" aux fabricants. Une offre en techniques alternatives (à faibles impacts environnementaux ou à bas coût) existe depuis une trentaine d'années : parmi les techniques alternatives les plus connues, on peut citer les techniques alternatives d'assainissement (noues, bassins de rétention, épuration par les plantes) et les techniques alternatives de production d'énergie (panneaux photovoltaïques, éoliennes, etc.). Ces techniques ont en commun de se développer en restant très proche de processus naturels (ainsi, les cycles de l'eau, les cycles solaires, effets des lois de la pesanteur, etc.) limitant les interventions techniques aux seuls usages de ces processus. Il s'agit donc d'agir à partir des techniques dites "douces". C'est par exemple l'usage de l'infiltration et de l'évapotranspiration pour les eaux pluviales, ou encore du soleil et de l'ombre dans la gestion climatique des espaces publics urbains. Ces techniques permettent de promouvoir des environnements urbains techniquement et économiquement viables et pérennes. Curieusement pourtant, malgré leur efficacité environnementale et économique, la plupart de ces techniques peinent à se généraliser dans la ville et ces techniques restent hors d'usage. Pourquoi ces techniques, alors même qu'elles correspondent aux préceptes du développement durable (économie d'énergie, faible émission polluante, etc.), peinent-elles à se généraliser ? Quelles sont les modalités de leur existence et de leur "naturalisation"? C'est précisément à cette question que nous tenterons de répondre à partir de l'étude des techniques urbaines de gestion de l'eau.