Les recherches menées depuis 2001 sur le massif de l'Argentera-Mercantour français ont jeté un nouvel éclairage sur les origines de la métallurgie du fer dans les Alpes du Sud. En fait, il devient possible d'esquisser un modèle d'activité extractive et sidérurgique de haute altitude et de l'inscrire dans un cadre chronologique pour trois districts du massif. Chacun d'eux comporte une mine ou des minières d'hématite, situées en crête, qui fournissent un ou plusieurs domaines métallurgiques en aval ; ceux-ci comportent un ou plusieurs ateliers de réduction directe du minerai. Dans la région de Saint-Etienne-de-Tinée, des minières à ciel ouvert ont exploité l'amas filonien d'hématite dans les micaschistes paléozoïques de la Cime du Fer (2500-2700) d'autres visaient l'hématite injectée dans des brèches des cargneules triasiques. Les aires de préparation du minerai ont été implantées en dessous de la limite inférieure des éboulis. Plus en aval, à une altitude de 2050-2070 m, ont été identifiés des places de production de charbon de bois et des ateliers de réduction du minerai. Au-dessus du village d'Isola, un filon d'hématite a été évidé à la Cime de Prals à plus de 2600 m d'altitude il a alimenté trois ateliers sidérurgiques en aval, vers 1500 m d'altitude dans le Vallon de la Guercia. Dans le district de Valdebore, les minéralisations d'hématite du Col Ferrière (2225-2484 m) sont associées à la formation des mylonites de la Valletta Mollières. Les affleurements d'hématite ont été exploités principalement au niveau de fentes minéralisées, elles ont fourni deux domaines métallurgiques. Au sud, dans le vallon de Millefonts, la préparation mécanique du minerai était réalisée à proximité des minières, le minerai calibré était réduit dans les bas fourneaux répartis entre 2010 et 1480 m. Au nord, dans la vallée de Margès, les ateliers de réduction du minerai ont été observés entre 2145 et 1670 m d'altitude. Dans l'ensemble, les âges radiocarbone fournis par les charbons recueillis sur les sites sidérurgiques, par sondage ou sur affleurements, indiquent que l'activité métallurgique a eu lieu entre le deuxième siècle BC et le septième siècle AD. L'extraction du minerai a été réalisée entre 2619 et 2225 m. Le minerai trié et concassé étant transporté vers l'aval. Les ateliers de réduction s'étagent soit entre 2145 et 2000 m, près de l'actuelle limite supérieure de la forêt, soit ils s'échelonnent dans l'étage subalpin, voire à plus basse altitude. Dans la partie supérieure de la vallée de l'Ubaye, près du village de Maurin et dans la vallée de Marie (Saint-Paul-sur-Ubaye), plusieurs ateliers sidérurgiques ont été reconnus, sans source de minerai clairement identifiée à ce jour. Les vestiges de réduction du fer les plus élevés sont localisés à 2175 m d'altitude. Les premiers éléments de datation radiocarbone concernent deux ateliers et couvrent une période comprise entre le cinquième et le neuvième siècle AD.