TR1
« Culture, Herméneutique et Transmission »
Les voies du sacré et du divin : un argumentaire
Les voies du sacré et du divin constituent, depuis la rentrée 2018-2019, le nouvel objet de réflexion de la Thématique de Recherche « Cultures, Herméneutique et Transmission ». Il s’agit non seulement d’un sujet nouveau qui vise à s’inscrire dans le temps long de la recherche universitaire mais aussi d’une problématique en lien avec le passé récent des activités scientifiques au sein de la TR1, notamment, dans l’axe « Arts, textes et images », deux des derniers grands colloques organisés : « Chemin, cheminement [1] » et « (D)Écrire le paysage [2] ». Ainsi, les chercheurs appartenant à la TR1 qui ont participé à ces réflexions devraient trouver un prolongement fructueux et stimulant à leurs précédents travaux dans les voies du sacré et du divin.
En effet, il semble bien qu’il soit toujours question de mouvement, de déplacement, d’impulsion (le chemin, le cheminement sont des voies à emprunter vers une meilleure connaissance de soi, de l’autre, du rapport de l’un à l’autre) et d’appréciation, de compréhension, d’analyse du monde qui nous entoure (le paysage, extérieur ou intérieur, aux champs d’investigation quasi-infinis, accueille l’itinéraire, la route, la voie que l’on prend pour mieux comprendre, interpréter et déchiffrer notre univers sensible).
D’autre part, en choisissant ce thème, la TR1 désire recentrer ses activités de recherche autour d’une problématique à la quadruple pertinence : choisir les voies du sacré et du divin, c’est revenir au cœur des interrogations qui sont celles de l’UR Céres de l’ICT (Culture, Éthique, Religion et Société) et ainsi réunir, du mieux possible, le profane et le religieux ; c’est aussi suivre les recommandations de l’HCERES en privilégiant une perspective de recherche longue qui puisse s’inscrire dans « l’humanisme intégral » que prône l’UR Céres ; c’est également dynamiser la TR1 et en rassembler les forces vives en commuant les compétences de chacun et en assurant la symbiose entre les axes « Arts, textes et images », « Herméneutiques bibliques » et « Théologie des pratiques », par exemple [3]; enfin, c’est accentuer la collaboration entre la TR1 et les autres TR, dont les problématiques rejoignent, par certains aspects, la question des voies du sacré et du divin.
L’hétérogénéité des parcours et des thématiques de travail des enseignants-chercheurs au sein de la TR1 pourrait apparaître comme un frein au bon déroulement de cette nouvelle réflexion scientifique : au contraire, malgré les différences notables que l’on discerne parmi les axes de travail des différents acteurs de la recherche à l’intérieur de la TR, faisons en sorte que pluridisciplinarité et transversalité s’avèrent de remarquables atouts dans la convergence de nos différentes spéculations !
Les voies du sacré et du divin constituent donc notre nouvelle matrice réflexive. S’il convient d’en comprendre toutes les subtilités sémantiques (que signifient véritablement les termes divin, sacré, religieux, profane, transcendance… ? Quelle acception leur donner aujourd’hui ? Comment ces concepts interagissent-ils les uns avec les autres ? Sont-ils aussi contradictoires et ambivalents qu’on pourrait, a priori, le penser ?), il faut aussi tenter d’explorer les infinies sinuosités herméneutiques et culturelles qu’offrent ces notions. Dans ce domaine, nos possibilités sont immenses : la littérature – profane et religieuse - les arts traditionnels, la musique, le cinéma, l’interculturalité, la sociologie, l’enseignement entre autres, constituent des leviers privilégiés visant à éclairer des parcours plus ou moins balisés.
À partir de quelques ouvrages fondamentaux [4] qui pourront, parmi de très nombreuses autres occurrences, aiguiser notre pensée, il conviendra de s’interroger sur ce qui relie le sacré et le divin, sur ce qui les sépare, les fait interagir dans les domaines des arts, des textes, de l’image, de la pratique religieuse, entre autres. Par exemple, quelles voies empruntent les textes bibliques pour rapprocher l’homme et Dieu ? Quelle est la part de transcendance dans nos sociétés contemporaines ? Le sacré est-il partout autour de nous ou devons-nous plutôt parler de croyance, de symbole ? Quelle est la part de sacré dans le cinéma ? Dans la musique ? Dans la peinture ? La pratique religieuse distingue-t-elle le sacré et le divin ? De quelle manière ? On le voit, les possibilités sont quasiment illimitées et devraient permettre, tout du moins progressivement, d’affiner nos perspectives, de concentrer nos efforts sur quelques aspects bien précis afin d’apparaître légitimes dans nos démarches scientifiques et experts sur ces questions fondamentalement humanistes.
Bien entendu, nous ne sommes pas les seuls à nous intéresser à cette thématique [5]. Mais, en convoquant nos atouts et nos expériences de chercheurs dans de nombreux domaines, en confrontant nos interrogations à celles de nos collègues philosophes, théologiens, exégètes, canonistes, spécialistes des questions d’éthique, de santé, de spiritualité, nous devrions être à même, en arpentant ces voies, d’en éclaircir les nombreux recoins, d’en signaler les chausse-trapes et les pièges afin de mieux nous repérer dans ces notions qui « nourrissent la raison de vivre de l’homme [6] ».
Au sein de la TR1, on trouve également le groupe de recherche en Théologie Pratique « vie et mission des communautés locales : enjeux théologiques et pastoraux » dont les réflexions s’insèrent parfaitement dans la thématique générale, puisqu’elles sont centrées sur les relations qu’entretient l’Homme dans son rapport à Dieu, sur les questions de consolidation de la foi ou de propagation de celle-ci.
Le groupe de recherche base son travail sur l’exhortation apostolique Evangelii Gaudium du Pape François (2013) qui rappelle avec insistance que « l’activité missionnaire « représente, aujourd’hui encore, le plus grand des défis pour l’Église » et que « la cause missionnaire doit avoir la première place » (EG 15). Il s’agit de promouvoir une « nouvelle évangélisation » qui se réalise dans trois domaines : « la pastorale ordinaire » – orientée « vers la croissance des croyants » –, la pastorale à l’égard « des personnes baptisées |…] n’ayant pas cependant une appartenance du cœur à l’Église », et « la proclamation de l’Évangile à ceux qui ne connaissent pas Jésus Christ ou l’ont toujours refusé » (EG 14). Le saint Père précise en outre qu’aux Épiscopats locaux appartient le « discernement de toutes les problématiques qui se présentent sur leurs territoires » (EG 16). Ce discernement pratique s’appuiera avec profit sur une analyse théologique des réalités locales ainsi que des initiatives qui fleurissent au sein de l’Église de France, pour certaines inspirées d’expériences outre-Atlantique en milieu évangéliste et/ou catholique.
Le groupe de recherche en Théologie Pratique, composé pour une part d’enseignants-chercheurs de l’IERP (Institut D’Études Religieuses et Pastorales) et pour une autre part de responsables d’Église locale (évêques ou vicaires généraux), cherche à :
- Repérer, analyser, du point de vue théologique, les propositions pastorales faites ces dernières années dans l’Église, en particulier en France afin de déterminer des critères de discernement.
- Le but ultime est de servir par la recherche la promotion de la nouvelle évangélisation dans et par les communautés locales.
Le groupe de recherche « Insolites dans la Bible » travaille sur des textes ou des motifs bibliques présentant un caractère insolite. Il s’interroge sur ce caractère, sur les principes herméneutiques qu'il met en jeu et sur les conséquences théologiques qu'il engendre.
Au sein de la TR1, on trouve également un autre groupe de recherche en Théologie Pratique qui réfléchit sur « Les quêtes spirituelles au XXIe siècle et les déplacements des croyances ». Ce groupe de recherche est né d’une demande de la Conférence des Evêques de France (CEF) qui a créé, il y a quelques années, l’Observatoire des Nouvelles Croyances. Celui-ci avait comme mission d’observer les manifestations contemporaines de la vie spirituelle et de la quête de sens. Ce groupe de recherche se propose de poursuivre ce travail de manière universitaire pour tenter de poser un diagnostic sur ces phénomènes et interroger les pratiques ecclésiales. Composés d’enseignants chercheurs de l’ICT, pour une part, et, pour une autre part, de personnes s’intéressant à la spiritualité et aux quêtes de sens contemporaines, il se donne pour tâche de :
- Comprendre ces nouvelles quêtes à partir d’études de terrain (cas d’études : public des monastères, domaine de la santé, lieux de pèlerinages, sanctuaires, littérature, etc.) ;
- Identifier les enjeux théologiques pour la foi chrétienne ;
- Chercher des corrélations positives permettant des points de rencontre avec le christianisme (Foi et culture) ;
- Réfléchir à l'accompagnement de ces quêtes.
Son approche pluridisciplinaire en Théologie, Anthropologie, Sciences humaines (psychologie, sociologie), Philosophie, reposant sur une analyse du terrain, permet la mise en place d'une réflexion en théologie pratique.
[1] Chemin, cheminement, Actes du colloque international de l’Institut Catholique de Toulouse, 29-31 mars 2012, Inter-Lignes, numéro spécial, janvier 2013.
[2] (D)Écrire le paysage, colloque de l’Institut Catholique de Toulouse, 6-8 décembre 2018, actes à paraître en 2020.
[3] Je pense aussi à « Insolites dans la Bible » et à « Nouvelles croyances », deux groupes de recherche qui s’inscrivent dans la recomposition de TR1.
[4] Mircéa ÉLIADE, Traité d’histoire des religions, Paris, 1964 ; Émile DURKHEIM, Les formes élémentaires de la vie religieuse, Paris, 1969 ; Roger CAILLOIS, L’homme et le sacré, Paris, 1991 ; Jean-Jacques WUNENBURGER, Le sacré, Paris, 2010 ; Régis DEBRAY, Jeunesse du sacré, Paris, 2012 ; Le sacré dans tous ses états. Catégories du vocabulaire religieux, de l’Antiquité à nos jours, études réunies par M. de SOUZA, A. PETERS-CUSTOT, F.-X. ROMANACCE, publication de l’université de Saint-Étienne, Saint-Étienne, 2012 ; Revue Esprit, Métamorphoses du sacré, dossier numérique n° 67, https://esprit.presse.fr/ressources/dossiers-thematiques/metamorphoses-du-sacre-67 (dernière consultation le 19 juin 2020).
[5] Il suffit de voir sur les sites Fabula (https://www.fabula.org/, dernière consultation le 18 juin 2020) et Calenda (https://calenda.org, dernière consultation le 18 juin 2020) le nombre de publications, de journées d’études et de colloques dans lesquels les termes divin ou sacré apparaissent.
[6] Jacques RIFFLET, « Peut-il exister une spiritualité laïque ? », dans Francs-Parlers, Bruxelles, 2011.