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Hdr Année : 2021

Making sense of extreme circumstances

Résumé

Making sense in extreme circumstances Social representational perspectives Habilitation thesis for the accreditation to supervise research Note de synthèse en vue de l'obtention de l'Habilitation à diriger des recherches
Note de synthèse en vue de l'obtention de l'Habilitation à diriger des recherches Cette note synthétise mes contributions à la compréhension de la pensée sociale dans les sociétés contemporaines confrontées aux circonstances extrêmes, menées dans une perspective socio-représentationnelle. Elle a deux fils rouges. Le premier porte sur la façon dont les sociétés contemporaines pensent les circonstances extrêmes. Il concerne la pensée sociale dans des circonstances qui polarisent la pensée, les conduites ou l'affect collectif, tels que risques collectifs liés à l'environnement, la santé et la violence. Le deuxième fil rouge porte sur la façon dont les personnes se sentent impliquées par l'appartenance aux groupes et le rôle de cette implication personnelle dans la polarisation de la pensée et des conduites collectives. Le premier chapitre situe mes recherches dans le prolongement d’interrogations nées lors d’un séisme survenu dans la seconde moitié du XXe siècle dans une société totalitaire de Europe de l’Est. Les personnes en ont-elles une « compréhension scientifique biaisée », ou bien mobilisent-elles des « théories » inscrites dans des rapports de pouvoir ? Je situe la pensée sociale dans un rapport post-totalitaire entre les autorités et les citoyens. Dans un tel contexte, les conduites ont une validité sociale, signalant une norme positionnellement différente de celles des autorités. Il n’est plus alors question de “perception du risque” individuelle et purement cognitive, mais de représentation sociale. Cette théorie pose le risque collectif comme phénomène social dans une société pensante. La pensée sociale apparaît comme un processus de groupe actif, de création de sens dans un contexte marqué par des relations de pouvoir, de perte et de recherche à rétablir une capacité d’agir, de résister dans une société où l’État est devenu source de méfiance et de peur pour ses citoyens. Je suggère que le sens et la réponse aux circonstances extrêmes se fonde sur des représentations, dont le sens s’inscrit dans les rapports sociaux, indissociable de l'élaboration des objets comme objets sociaux à travers ces rapports qui façonnent la culture, les communications, la mémoire collective, etc. Je souligne la pertinence de la théorie des représentations sociales pour saisir la pensée sociale à l’égard des risques collectifs dans leur dynamique collective et subjective. Le Chapitre 2 présente le cadre conceptuel des représentations sociales nécessaire pour inscrire le sens et la réponse aux circonstances extrêmes dans la continuité d’un paysage de pensée plus général des sociétés contemporaines dont elle est indissociable. Comment pensent-on le rapport au risque ? Qu'est-ce qui fait agir ou, au contraire, s'abstenir d’agir ? Les relations avec les autres et les phénomènes de sociabilité peuvent-ils jouer un rôle ? Ensuite, je présente la pensée sociale comme objet de recherche en psychologie sociale et rappelle ses fondements théoriques et notions principales. Enfin, j'introduis l’implication personnelle, variable explicative de la pensée sociale, qui définit la position d’une personne vis-à-vis d’un objet social et permet de comprendre la “position” des objets dans son espace cognitif, son sens de l’engagement ou l’indifférence à leur égard. Le Chapitre 3 présente mes recherches sur la pensée sociale et l’implication personnelle dans des circonstances extrêmes tels que les risques environnementaux et sociétaux - crise financière, violence d’Etat (totalitarisme), terrorisme. Les premières études abordent le risque sismique dans une région à sismicité modérée au sein d’une société post-totalitaire, montrant que l'environnement physique et social qui alimente la culture du risque semble être suffisant pour saturer la composante normative de la représentation du risque même en l'absence de pratiques. Le deuxième résultat montre que représentations de nature normative deviennent plus axées sur la pratique pour ceux qui ont vécu un séisme destructeur. Un tel vécu structure la composante fonctionnelle de la représentation sociale, sans effet significatif sur sa composante évaluative, et a des répercussions nuancées sur ses aspects émotionnels. Cette orientation plus fonctionnelle est-elle plus efficace pour guider les conduites ? Mon étude sur la pensée sociale au sujet de la crise financière de 2008 a montré que oui (fonction prescriptive). Cependant, ladite crise financière a été loin d’être irréversible ou suffisamment "extraordinaire” pour déclencher un changement de pratiques pouvant mettre en cause les représentations. Mes recherches sur la pensée sociale à l’égard du terrorisme menées aux Etats-Unis et en France après les attaques du 11 septembre 2001 ont montré que les représentations de sens commun (passagers) avaient une faible structuration périphérique et des capacités de modulation réduites par rapport aux professionnels de la sécurité des aéroports. Elles soutenaient une pensée normative, plus radicale, de type nexus mobilisateur. Après les attentats terroristes de Paris en janvier 2015, les données recueillies en ligne en temps réel m’ont permis de mieux explorer cette notion. J’ai constaté un contraste frappant entre la réponse quasi-unanime à l'attaque contre Charlie Hebdo, qui fédérait la société française au-delà des différences intergroupes, et la réponse modeste à l'attaque antisémite de Vincennes. La notion de nexus mobilisateur a permis de mieux comprendre certaines identités polarisées devenues proéminentes dans la foule digitale, attirant l’attention sur la nécessité de préparer une résilience sociale basée sur des identités inclusives plutôt qu'exclusives. Enfin, j’ai exploré les représentations sociales de la justice et l'injustice dans une société post-totalitaire. D'un point de vue structurel, même 25 ans après la chute du totalitarisme, l'Autorité elle-même est restée un élément organisateur, imprimant son sens hégémonique aux représentations des citoyens socialisés en captivité. Je considère ces résultats comme une contribution à la compréhension de la psychologie sociale du totalitarisme, un pas en avant dans la compréhension de l'emprise totalitaire, l'idée selon laquelle dans un système totalitaire la soumission externe cède la place à la soumission interne (Moscovici, 1981). La seconde partie du chapitre 3 présente mes études sur le lien entre l’implication personnelle et les aspects normatifs et pratiques, voire mobilisateurs, de la pensée sociale. Elles portent sur les séismes, la crise financière, le terrorisme, le totalitarisme, les prescriptions comportementales contradictoires lors d'une épidémie. J’ai constaté l’effet à long du contrôle totalitaire sur l’implication “culturelle”, réduisant la capacité perçue d’action. Un second constat important est qu'en situation de menace, en l'absence de pratique, l'implication personnelle est liée à une forme plus radicale de pensée sociale, où les critères d'identité sociale sont des critères d'action et de mobilisation collective: le nexus mobilisateur. Je vois ces résultats comme des contributions à la théorisation de cette notion et à l’intégration des théories des représentations sociales et de l'identité sociale. Le chapitre 4 argumente en faveur de futures recherches qui ajoutent une voix à l'intégration des cadres conceptuels des représentations sociales, du changement social et de l'identité sociale. Je présente quelques ancrages théoriques et implications méthodologiques d’une approche de la recherche en psychologie sociale informée par le trauma. Premièrement, je présente une perspective sur l'identité politisée vs. psychologisée, et une théorie psychosociale du citoyen qui introduit le pouvoir dans l'équation. Deuxièmement, je rappelle une perspective féministe sur l'identité sociale et l'oppression. En m'appuyant sur les deux, je discute l’intérêt d’une recherche informée par le trauma dans la bataille des visions qui s'affrontent dans les contextes marqués par les opérations négatives du pouvoir. La recherche informée par le trauma entend les conduites comme des réponses à des environnements défavorables. Les réponses comportementales remplissent des fonctions de protection qui tirent parti de la capacité humaine à donner un sens et à agir. Comme la théorie des représentations sociales, cette approche prend au sérieux le sens construit par les personnes, plutôt que de le considérer en termes de biais cognitifs, de troubles, motivations individuelles, etc. J’explore cette approche dans les projets de recherche menés avec mes doctorantes. J’illustre comment une approche méthodologique informée par le trauma peut éclairer la théorisation psychosociale de la notion de déni de reconnaissance, à partir d’une recherche empirique sur l'asymétrie du pouvoir et le vécu du déni de reconnaissance de l’identité nationale de jeunes femmes musulmanes françaises qui portent un foulard. Enfin, j’aborde la violence contre les femmes et les enfants comme opération négative de pouvoir et problème majeur de santé publique, de sécurité et d’égalité. Je propose une exploration de la place et des marqueurs des violences intrafamiliales dans l'extrémisme violent qui s’appuie sur des processus psychosociaux comme la déshumanisation, la misogynie, et la notion de continuum de la violence (Kelly, 1987). Cette perspective plaide pour une approche genrée et informée par le trauma en faveur d’une psychologie du pouvoir, de la résistance et de la violence.
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Dates et versions

tel-04218158 , version 1 (27-09-2023)

Identifiants

  • HAL Id : tel-04218158 , version 1

Citer

Andreea Gruev-Vintila. Making sense of extreme circumstances. Humanities and Social Sciences. Université Lyon 2, 2021. ⟨tel-04218158⟩
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