Ce mémoire original a un double enjeu : rendre lisible l'armature, tant problématique que méthodologique, dans laquelle je propose d'encadrer le travail de futurs chercheurs. Il s'agit en effet, en tant qu'architecte appelée à diriger des thèses d'autres concepteurs, de se positionner dans le débat contemporain sur les rapports entre projet et recherche. Pour ce faire, je repère en première partie, dans un corpus de démarches de "research by design", divers rapports à la science dont j'approfondis les modalités : la démarche déductive, inductive et abductive, les diverses formes de recherche-action, le praticien réflexif. Il en émerge un panel de neuf "modes opératoires" communs aux démarches de recherche et de projet. Et je montre que c'est la manière dont ces opérations identiques sont mobilisées et articulées entre elles qui produit des démarches distinctes, dans des visées différentes, dont la cohérence peut être évaluée. Dans une deuxième partie, cette grille méthodologique est appliquée à un échantillon de mes propres recherches. Celui-ci porte sur un terrain, le "transfrontalier", inscrit dans un intérêt croissant des sciences pour les "entre-deux". Il permet de travailler sur les problématiques d'inter-territorialité, dans la recomposition actuelle de l'urbanisme (acteurs, périmètres, outils), certaines touchant particulièrement les concepteurs : représentations, définitions, visibilité/lisibilité, processus de projet, modèles sous-jacents, co-construction, etc. Une dernière partie croise de façon réflexive les deux précédentes : relire la recherche de la partie 2 à la lumière du panel opératoire repéré en partie 1, amène d'un côté à affiner ses catégories d'investigation, et de l'autre, à élaborer une distance critique sur la recherche. Ce qui permet d'ouvrir un panorama de nouveaux travaux à développer, en recherche ou en projet, dans le champ de questionnement qu'induit le territoire transfrontalier.