Cette thèse propose une analyse des conséquences à court et à long terme des morts militaires de la Première Guerre Mondiale sur le travail des femmes en France. Le premier chapitre décrit la mesure du taux de mortalité militaire utilisée tout au long de la thèse et explore ses sources de variation systématique. Le second chapitre montre que la pénurie d'hommes résultant de la guerre a généré une augmentation du travail des femmes qui a persisté tout au long de l'entre-deux-guerres. Une augmentation de l'offre de travail des femmes permet d'expliquer ce résultat: des conditions détériorées sur le marché du mariage et des chocs de revenu négatifs subis par les veuves de guerre ont induit nombre de ces femmes à rentrer sur le marché du travail après la guerre. En revanche, les firmes n'ont pas augmenté leur demande de travail féminin pour compenser la pénurie d'hommes. Enfin, le troisième chapitre montre que ce choc initial sur le travail des femmes s'est perpétué à travers les générations jusqu'à aujourd'hui. Trois mécanismes permettent d'expliquer ce phénomène de persistance historique: une transmission intergénérationnelle verticale (des mères et des pères aux filles), une transmission à travers le mariage (des maris aux épouses et des belles-mères aux belles-filles), et une transmission intergénérationnelle oblique (des migrants aux non-migrants). En accord avec les théories de la transmission intergénérationnelle, ce chapitre montre aussi que les morts militaires de la Première Guerre Mondiale ont altéré de façon permanente les préférences et croyances de la population envers le travail des femmes.