L’exercice consistant à présenter un parcours de recherches commencé il y a une vingtaine d’années oblige à retrouver les racines de la question de l’historien qu’Antoine Prost évoque dans ses Douze leçons d’histoire1 . Il invite à porter un regard rétrospectif sur son itinéraire et à en reconstituer la logique, même si ce parcours n’a pas été rectiligne. Cet exercice incite à l’optimisme car il force à gommer les aléas d’une trajectoire pour faire ressortir les étapes d’une intégration progressive dans le champ de la recherche en histoire contemporaine. Le temps de la rédaction, l’exercice permet aussi de penser que l’histoire de la statistique publique et du chiffrage, celle des techniques d’information sur les entreprises et sur les particuliers peuvent permettre d’éviter les dérives induites par la facilité croissante des pratiques d’enregistrement et de croisement des données individuelles avec l’usage de l’informatique. Ces pratiques renvoient au passé de la statistique publique française qui est mon premier objet d’études. Le numéro d’identification des personnes est introduit pendant l’Occupation par René Carmille, fondateur et directeur général du Service National des Statistiques (SNS) * , l’ancêtre immédiat de l’Institut National de la Statistique et des Études Économiques (INSEE). Malgré tout, il ne s’agit pas ici de présenter un parcours militant, ce qu’il n’est pas, mais il ne s’agit pas non plus de laisser penser qu’il est dépourvu de toute lucidité. Plusieurs de ses enseignements invitent au contraire à la plus grande vigilance à l’égard des orientations actuelles.