La contribution de la Cour européenne des droits de l’homme au développement de recours effectifs protégeant les droits et libertés fondamentaux
Résumé
The right to an effective remedy enabling individuals to complain about the violation of their rights under the European Convention on Human Rights is protected by Article 13 of the Convention. Unlike Article 6 § 1 of the ECHR and other human rights treaties, this provision does not require the establishment of a judicial remedy. The ECtHR leaves a margin of appreciation to states to determine what remedies are appropriate in the national context. Despite this flexibility, Article 13 has given rise to numerous findings of violation, often resulting in systemic problems that lead to a large number of repetitive applications clogging the Court. In order to limit the deleterious overloading of the Court's role, the Interlaken reform process made the creation of domestic remedies a top priority, so that alleged violations of the Convention would be dealt with primarily at the national level, in line with the principle of subsidiarity. In the context of the execution of the Court's judgments, the States Parties to the Convention have put in place numerous domestic remedies that are considered effective, both general remedies and specific remedies with a defined scope of application. This suggests that the European Court of Human Rights has indeed contributed to the development of effective domestic remedies protecting rights and freedoms, even if the creation of new domestic remedies has sometimes led to the questionable repatriation of applications originally brought before the European Court of Human Rights. However, judgments of the European Court requiring the establishment of effective remedies are sometimes not diligently implemented. In such cases, the Court's contribution to the development of effective domestic remedies is hampered, either because states create ineffective remedies or because no remedies are created several years after repeated findings of violations of Article 13 ECHR. The assessment of the contribution of the European Court of Human Rights to the development of effective domestic remedies protecting freedoms is therefore mixed, as it is largely dependent on the goodwill of States Parties to the Convention.
Le droit à un recours effectif permettant aux individus de se plaindre de la violation des droits que leur garantit la Convention européenne des droits de l’homme est protégé par l’article 13 de la Convention. A la différence de l’article 6 § 1 de la CEDH et d’autres traités de protection des droits de l’homme, cette disposition n’exige pas la mise en place d’un recours juridictionnel. La Cour européenne des droits de l’homme laisse aux États une marge d’appréciation pour déterminer quelles sont les voies de recours adéquates au regard du contexte national. Malgré cette souplesse, l’article 13 a donné lieu à de nombreux constats de violation, résultant bien souvent de problèmes systémiques de nature à provoquer un grand nombre de requêtes répétitives engorgeant la Cour. Pour limiter la surcharge délétère du rôle de la Cour, le processus de réforme d’Interlaken a érigé la création de voies de recours internes au rang des grandes priorités, afin que les violations alléguées de la Convention soient en priorité traitées à l’échelon national, dans la logique du principe de subsidiarité. Dans le contexte de l’exécution des arrêts de la Cour, les États parties à la Convention ont mis en place de nombreux recours internes jugés effectifs, qu’il s’agisse de recours généraux ou de recours spécifiques avec un champ d’application balisé. Cela permet d’affirmer que la Cour européenne des droits de l’homme a effectivement contribué au développement de recours internes effectifs protégeant les droits et libertés, même si la création de nouveaux recours internes a parfois pu conduire au rapatriement discutable de requêtes initialement portées devant la Cour européenne des droits de l’homme. Toutefois, il arrive que les arrêts de la juridiction européenne exigeant la mise en place de recours effectifs ne soient pas exécutés avec diligence. Dans ce cas, la contribution de la Cour au développement de recours internes effectifs est entravée, soit parce que les États créent des recours ineffectifs, soient parce qu’aucun recours n’est créé plusieurs années après des constats répétés de violation de l’article 13 de la CEDH. L’évaluation de la contribution de la Cour européenne des droits de l’homme au développement de recours internes effectifs protégeant les libertés est donc mitigée, car elle est largement tributaire de la bonne volonté des États parties à la Convention.