La mesure exacte de la corruption en France est toujours un exercice difficile, s'agissant d'une infraction occulte par nature, résultant d'un accord entre corrupteur et corrompu où chacun a tout intérêt au secret le plus absolu. Si les conséquences de la corruption se font régulièrement ressentir, par la déliquescence du tissu social, la perte de confiance dans les institutions et par les atteintes aux finances publiques qui en résultent, évaluer avec précision la menace qu'elle représente est un enjeu majeur de l'action publique, d'autant que la corruption est une des armes employées par les groupes criminels organisés pour faciliter leurs activités illicites par-delà les frontières.C'est dans cet objectif que le projet piloté par l'Agence française anticorruption (AFA) et le centre de recherche de l'École nationale supérieure de la police (CRENSP) nous est apparu comme une opportunité exceptionnelle de faire progresser la connaissance, en permettant à une équipe pluridisciplinaire de recherches de se plonger dans les données issues de l'activité des services de police entre 2014 et 2022.Les travaux, conduits avec l'appui de la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ) et de son office spécialisé, l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF), s'ils confortent les analyses précédemment élaborées au sein de la police nationale, permettent une analyse plus fine des chiffres, enrichie par des sources complémentaires. Finalement, il en résulte une meilleure compréhension des phénomènes de corruption à l'oeuvre sur le territoire. Au-delà d'une approche quantitative indispensable, les chercheurs missionnés ont aussi esquissé une première approche qualitative, à la fois des enquêtes menées mais aussi des dispositifs en place pour lutter contre les atteintes à la probité.Associer services d'enquêtes et chercheurs, comme s'attache à le faire le CRENSP, constitue ainsi une démarche porteuse de grandes attentes, des plus intéressantes afin d'enrichir les connaissances communes, susciter des réflexions croisées et in fine adapter au mieux la réponse des autorités publiques.