Des premières négociations engagées dans le sillage du Plan Schuman jusqu'aux débats plus récents sur la « nouvelle gouvernance européenne » (DE LASSALLE, M., GEORGAKAKIS, D., 2008), la théorie a continûment joué un rôle déterminant dans la fabrication et la légitimation du gouvernement de l'Union européenne. Souvent, d'ailleurs, les emprunts à la science sont, sinon explicites, du moins aisément décelables dans les textes officiels produits par ses institutions. On le sait, la théorie politique (fonctionnalisme de David Mitrany, puis néofonctionnalisme d'Ernst Haas) a fortement marqué l'esprit des « pères fondateurs » de l'Europe. Mais d'autres champs académiques, tels ceux de l'histoire et de l'économie, n'ont eux aussi jamais cessé d'inspirer les voies et méthodes du projet d'unification (ROBERT, C., VAUCHEZ, A., 2010). La question du lien entre les Européens et l'Union ne fait pas exception. Qu'il s'agisse de mesurer les attitudes du grand public à l'égard des politiques et institutions communautaires, de mettre en oeuvre une politique d'information ou encore d'améliorer la couverture médiatique de la vie politique européenne, les political scientists produisent, depuis loin, diagnostics et préconisations prisées des responsables communautaires. Depuis deux décennies, ces « problèmes » déjà bien ressassés ont été réinvestis dans une conceptualisation proprement communautaire de l'espace public. Celle-ci constitue aujourd'hui une pièce centrale de la théorie de la gouvernance élaborée par les institutions de l'Union.