Quelques réflexions sur le phénomène de conversion à l'islam à travers le cas des catholiques albanais observé par une mission jésuite à la fin de l'époque ottomane
Résumé
Even if we have to be cautious about the dialectic of the missionaries who have a particular perspective, an examination of their reports allow us to understand that conversion is a complex phenomenon that has often to be explained by a combination of factors at various levels (general, regional, individual) and of various kinds (political, economic, psychological, etc..), and not just for one factoron, rarely directly explained in sources. In the cases studied (those of Catholic Albanians around 1900), we note that the conversion is sometimes associated with a rupture with the original milieu (with the tribe, or the Catholic Church). The conversion is often the culmination of a gradual process (change of name, adoption of certain practices, and finally only official conversion). In these regions, in this late Ottoman period, conversion is mainly the result of the higher status given to Muslim identity and the confusion in the countryside between Albanian identity and Muslim identity and in some cases, between clan identity and Muslim identity in the mountains. Economic factors such as the desire to avoid taxes, seem therefore absent at the time, for this population. In addition, if the phenomena of syncretism and crypto-Christianity have existed, we must relativize their importance. It is indeed themes that have often been exploited to prove the unimportance of religion, the multiconfessional nature or the "true Christian nature" of Albanians.
Même s'il faut rester prudent quant à la dialectique des missionnaires qui, je ne l'ai pas suffisamment souligné dans le texte, ont une optique particulière, l'examen de leurs rapports permet de comprendre que la conversion est un phénomène complexe qui ne peut souvent s'expliquer que par une combinaison de facteurs de divers niveaux (général, régional, individuel) et de diverses natures (politique, économique, psychologique, etc.), et non pour un seul motif, d'ailleurs rarement explicité dans les sources. Dans le cas étudié (celui des catholiques albanais vers 1900), on remarque que la conversion est parfois associée à une rupture avec la société d'origine (avec la tribu, ou l'Église catholique). La conversion est aussi souvent l'aboutissement d'un processus graduel (changement de nom, adoption de certaines pratiques, et enfin seulement conversion officielle). Dans ces régions, en cette fin d'époque ottomane, elle est surtout la conséquence du statut supérieur attribué à l'identité musulmane et de l'amalgame qui se fait dans les campagnes entre identité albanaise et identité musulmane et, dans certains cas, entre identité clanique et identité musulmane dans les montagnes. Des facteurs économiques souvent cités, comme le désir d'échapper à la taxation, semblent donc absent à cette époque, pour cette population. En outre, si des phénomènes de syncrétisme et de crypto-christianisme ont existé, il faut relativiser leur importance. Il s'agit en effet de thèmes qui ont souvent été instrumentalisés, pour prouver la non-importance de la religion, la nature multiconfessionnelle ou la « vraie nature » chrétienne des Albanais.
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