Dans cet article, nous examinons le lien entre l'épistémologie et la polémologie. Notre objectif est d'interroger la possibilité d'une théorie de la connaissance dans un contexte de pluralité des représentations et de luttes pour le monopole de l'énonciation de la vérité – donc des valeurs constitutives du meilleur régime – dans l'espace public. La « guerre des dieux », ce conflit entre les perspectives antagonistes à travers lesquelles les acteurs organisent leur rapport à leur environnement, place l'épistémologie devant un dilemme : persister dans un idéal de vérité unifiée, aveugle à la diversité des modes d'appréhension de la réalité, ou bien y renoncer et accepter un relativisme radical. En organisant le dialogue entre plusieurs traditions théoriques, et notamment entre Mannheim et Popper, nous souhaitons montrer ici que le choix entre ces deux options peut être évité. Nous nous inscrivons pour cela dans un cadre éthico-politique fondé sur la notion d'« ontologie temporaire » et sur l'idée d'un équilibre entre ouverture à l'altérité et clôture du sens commun.