Analyse d'une batterie de six foyers à pierres chauffées Au début de l'été 2020, une fouille préventive a été menée en amont de la construction d'un projet immobilier au nord-est de la commune de Corbas. La fouille menée sur 2450 m² a permis la mise au jour d'un réseau fossoyé probablement moderne à contemporain ; il est accompagné d'une fosse ayant livré un dépôt de bovidé. Toutefois, comme attendu par la prescription, la majorité de l'occupation s'attache à la Protohistoire avec un trou de poteau isolé du Bronze final I, quelques concentrations céramiques de la fin de l'âge du Bronze et surtout une batterie de six foyers à pierres chauffées de la transition Bronze final/Premier âge du Fer. Cette batterie, déjà en partie reconnue lors d'un diagnostic en 2019 (resp. C. Bellon, Inrap), est composée de six foyers rectangulaires particulièrement bien conservés. Les fosses à fond plat sont rubéfiées, livrant un niveau charbonneux, un à deux niveaux de galets très dense et un niveau d'abandon. Ce dernier n'a donné que quelques restes céramiques et de rares esquilles osseuses. Les fosses ont des largeurs variant entre 1,1 et 1,4 m pour des longueur comprises entre 2 et 2,4 m. Elles forment un alignement globalement orienté vers le nord en léger arc de cercle sur 23 m, avec des espacements compris entre 1,5 et 2,5 m. Les niveaux charbonneux ont été prélevés et analysés en anthracologie, ce qui permet notamment de voir des différences dans les espèces ligneuses présentes, avec une majorité de chêne et de hêtre. Les charges pierreuses sont très riches avec un poids moyen par foyer de 207 kg pour un nombre moyen de 870 éléments. Les dimensions moyennes des galets sur la batterie sont de 15,3 cm de longueur pour 11,2 cm de largeur. Ce total d'1,2 t de pierre a été prélevé et un remontage exhaustif a été mené sur l'ensemble des foyers, ce qui permet une connaissance poussée du matériau sélectionné pour les foyers et de son mode de fragmentation dans les structures. Enfin, des analyses chimiques ont été réalisées sur plusieurs galets au sein de chaque foyer. L'ensemble de ces analyses sur des foyers bien conservés ont donné des résultats qui ont été analysés de manière statistique et couplés au contexte local pour autoriser un certain nombre d'hypothèses sur l'implantation, la finalité et le fonctionnement de cette batterie. Ces six foyers semblent avoir été implantés par paires avec l'établissement d'un premier couple central de structures, puis de deux autres couples en symétrie. Chaque couple semble avoir bénéficié d'un mode d'implantation (creusement) et d'un apport en bois indépendants, ce qui pourrait traduire un évènement simultané regroupant plusieurs populations différentes. Au sein de chaque paire, une complémentarité de structures est visible avec une fosse plus riche en combustibles et en pierres (poids de restes) et une autre structure moins dotée. Pratiquement aucun remontage entre foyers a été repéré, ce qui laisse présager une gestion indépendante des charges pierreuses. Les analyses chimiques mettent en évidence la présence de produits animaux a priori non-ruminants sur l'ensemble des foyers (viande et graisse). Seuls deux foyers qui présentent un vide central se démarquent par une plus forte présence de produits gras. Cette batterie de foyers semble localement isolée de toute structure contemporaine et l'origine des galets est distante d'environ 900 m de notre site, ce qui représente un fort investissement logistique pour leur transport. Toutefois, d'autres structures à pierres chauffantes sont très similaires sur le site d'habitat de Corbas "Les Grands Champs", distant de seulement 700 m. Un lien entre ce site d'habitat et notre batterie, plus éloignée, est donc probable.