Dans Le Chantier littéraire (2010) écrit au début des années 1980, au moment où elle commence à enseigner régulièrement dans les universités états-uniennes, Wittig forge un étonnant rapprochement : « Tout travail littéraire important est au moment de sa production comme un Cheval de Troie, toujours il s’effectue en territoire hostile dans lequel il apparaît étrange, inassimilable, non conforme. Puis […] la cité fait place à la machine dans ses murs. Il faut qu’elle soit adoptée pour accomplir son travail de minage et de sapage des conventions littéraires et sociales et les dévoiler comme périmées, incapables d’opérer des transformations ». Si l’image est suggestive, elle soulève cependant l’épineuse question de la transmission, en classe, de ces œuvres féministes : quels dispositifs adopter pour que les étudiant.es abordent ces textes difficiles (tant dans leurs contenus que dans leurs formes – élitistes ?) et quelle est la responsabilité des enseignant.es dans l’appropriation par les étudiant.es de ces œuvres qui se pensent comme des « machines de guerre » ? La communication creusera l’image wittigienne de l’œuvre comme Cheval de Troie, et s’appuiera sur des analyses de cas concrets, vécus en classe dans un cursus de master en Etudes sur le genre. Ce faisant, sera aussi convoquée la réflexion de bell hooks sur la nécessité d’inventer des pédagogies féministes.