De nombreux travaux se sont penchés sur l'immobilité, la cantonnant parfois à un artefact des méthodes d'enquête ou à des situations particulières, voire exceptionnelles. Les résultats de Motte-Baumvol et ses collègues suggèrent toutefois que l'immobilité plus fréquente des retraités et des inactifs est la manifestation d'un niveau de contrainte moindre sur leur emploi du temps que celui des travailleurs, révélant une grande variabilité au jour le jour. Nous nous attardons ici sur la situation des retraités en France. Dans la perspective du vieillissement démographique, la meilleure compréhension des entraves à leurs déplacements est cruciale, notamment pour identifier et évaluer les populations âgées à risque d'une immobilité exacerbée. Nous nous appuyons pour cela sur les données de l’Enquête Mobilité des Personnes 2018-2019 (SDES). Nous utilisons un modèle d'équation à variable latente pour évaluer les effets de trois facteurs : les situations de déplacements posant problème (monter des marches, etc.), la motorisation et la vie en couple, dont les impacts sur l'immobilité sont peu connus, notamment parce qu'ils posent des problèmes d'endogénéité et de multi-colinéarité. Notre recherche apporte plusieurs contributions nouvelles à la compréhension de la mobilité, nuançant la littérature existante. Il existe un vrai gap entre les retraités qui sortent tous les jours et ceux à qui il arrive de rester à la maison un jour ou plus, suggérant que la retraite ne conduit pas nécessairement à une immobilité croissante du fait d'une progressive diminution des contraintes temporelles, contrairement à ce qui avait été montré sur l'Angleterre. D'autre part, l'âge explique en grande partie la survenue des difficultés de déplacement, qu'elles soient physiques ou liées à la conduite, mais ces dernières apparaissent aussi comme des construits sociaux influencés par le niveau d'éducation, le sexe ou la localisation urbaine. Ces difficultés sont fortement liées à l'immobilité.