L’idée de résilience portée par l’entreprise s’inscrit dans une idéalisation d’un fonctionnement dans lequel il n’y aurait pas de toxicité. Cela revient à nier que certaines personnes s’emploient, silencieusement, à la réduire. Les conventions d’entreprise sont dans le déni de tout ce qui ne va pas. On en revient à l’ambiguïté autour du mot de résilience : valoriser le positif pour augmenter le courage des employés face aux difficultés. L’idéal de la résilience prive de légitimité les sentiments négatifs, qui sont inévitables et même nécessaires dans beaucoup de situations sociales. Flexibilité, résilience, gouvernance, communautarisme, ethnicité, mondialisation, dialogue social... Ces mots nouveaux utilisés par les intellectuels médiatiques, les politiques, les hauts fonctionnaires internationaux, permettent de cacher les conflictualités sociales, et celui de résilience en fait partie. Or, la résilience ne peut pas se limiter à une entreprise, une ville ou une région. Elle doit prendre en compte les solidarités, y compris les solidarités à un niveau mondial. À tous les niveaux, la résilience n’existe pas, il n’existe que des co-résiliences. Autrement dit, il n’y a pas de personne résiliente en elle-même, il n’y a pas d’entreprise résiliente en elle-même, il n’y a que des réseaux d’interrelations qui permettent de construire des co-résiliences.