Depuis le début de la guerre contre le narcotrafic, des millions de personnes ont disparu au Mexique. Tandis que leurs familles ne cessent de les chercher, l’État s’obstine dans un récit manichéen qui minimise ou revictimise leur douleur. Une « dispute mémorielle » agite donc le pays, où les familles, organisées en collectifs, luttent pour obtenir justice et dignité. Dans l’État du Nuevo León, le FUNDENL (Fuerzas Unidas por Nuestros Desaparecidos en Nuevo León), l’un des collectifs les plus actifs, a choisi l’appropriation de l’espace public et l’installation d’un anti-monument afin de forcer l’État à reconnaître sa présence et ses revendications. Mais outre la reconnaissance officielle de la part de l’État, ces collectifs cherchent à solidariser le reste de la société civile à leur cause, afin que leur douleur soit vue comme un « trauma culturel ». Dans ce contexte, l’espace digital est un outil crucial dans l’activisme et la politisation citoyenne actuelle. L’artiviste Zahara Gómez Lucini crée donc avec le FUNDENL un dispositif de communication digitale afin d’établir des ponts entre les familles de victimes et le reste de la société civile. À travers l’émotion, l’empathie et l’identification permises par le dispositif musical du Cancionero para no olvidar, l’objectif est d’encourager les citoyens à se politiser et à agir autour des disparitions forcées, afin qu’elles soient reconnues comme un problème social et collectif.