Les États du G7 et de l’Union européenne partagent la volonté politique de réaffecter les avoirs « gelés » de la Russie, de ses dirigeants et des oligarques proches du régime, soit au soutien de l’effort de guerre en Ukraine, soit pour réparer les dommages causés par les actes de guerre attribués à la Russie. Les tensions qui entourent la validité juridique d’une telle démarche inhibent pourtant sa matérialisation. Si les quelques 300 milliards d’euros « gelés » constituent une manne financière considérable, leur réaffectation à l’Ukraine implique en effet de les confisquer. Or, si le « gel » est une mesure de police internationale classique – quoique sa licéité au regard du droit international soit elle-même loin d’être acquise – l’hypothèse de la confiscation et de la réaffectation est autrement plus débattable encore. Cette contribution n’est pas le lieu d’un argumentaire juridique sur les fondements invocables de licéité ou bien sur les griefs d’illicéité de la réaffectation des avoirs russes à l’Ukraine. Son objet consiste à montrer combien les hésitations et petits pas qui résultent de cet état d’incertitude juridique sont à la hauteur de la révolution que traverse l’ordre international au sujet des réactions à l’illicite adoptées par des États tiers au conflit.