Les produits phytopharmaceutiques contaminent l’ensemble des compartiments environnementaux, dont le sol, et sont un acteur important de la dégradation de la biodiversité et des services écosystémiques (Leenhardt et al. 2023). En France, des cocktails de pesticides sont retrouvés de façon récurrente dans des sols de grandes cultures, avec la présence notamment de diflufenican, époxiconazole et imidaclopride (Pelosi et al. 2021). Ces cocktails de molécules ont un impact avéré sur les organismes du sol (Panico et al. 2022). En conditions naturelles, cet impact peut provenir de l’effet direct ou indirect des pesticides sur les organismes non-cibles. Les effets indirects se manifestent lorsqu’un pesticide modifie les interactions entre organismes (prédation, compétition, facilitation) ou lorsqu’un organisme affecte la biodisponibilité des pesticides par son action sur l’environnement. Pour autant, dans les approches d’écotoxicologie classiques, les impacts des pesticides sont le plus souvent déterminées à partir de tests de laboratoire qui manquent de réalisme écologique. Ces tests sont en effet basés sur l’utilisation d’espèces modèles peu représentatives des espèces rencontrées au champ, ne prennent pas en compte les effets sur des communautés d’espèces interagissant entre elles, et considèrent rarement les effets de mélanges de plusieurs substances actives. Dans le cadre de cette étude, nous avons étudié les effets d’un cocktail de diflufenican, d’époxiconazole et d’imidaclopride à des doses représentatives des sols agricoles, sur une chaine trophique simplifiée du sol. Cette chaîne est composée de trois annélides détritivores (Enchytraeus albidus, Aporrectodea caliginosa et Allolobophora chlorotica) et d’un coléoptère prédateur (Poecilus cupreus). Ces espèces ont été étudiées en conditions mono- et pluri-spécifiques, en présence ou non du mélange de pesticides. Le suivi de la survie, de la reproduction et de la biomasse dans chaque condition permettra d’évaluer les effets des pesticides sur chaque organisme, d’analyser si cet impact est modulé par les interactions entre organismes, mais également de tester les effets des pesticides sur les interactions de prédation et compétition entre espèces. Les résultats obtenus nous permettrons de proposer des pistes d’amélioration des tests standardisés utilisés classiquement dans l’évaluation de l’impact des pesticides, afin d’accroître leur réalisme écologique. Références Leenhardt, Sophie, Laure Mamy, Stéphane Pesce, et Wilfried Sanchez. 2023. Impacts des produits phytopharmaceutiques sur la biodiversité et les services écosystémiques. éditions Quae. https://doi.org/10.35690/978-2-7592-3657-2. Panico, Speranza C., Cornelis A.M. Van Gestel, Rudo A. Verweij, Magali Rault, Colette Bertrand, Carlos A. Menacho Barriga, Michaël Coeurdassier, Clémentine Fritsch, Frédéric Gimbert, et Céline Pelosi. 2022. « Field Mixtures of Currently Used Pesticides in Agricultural Soil Pose a Risk to Soil Invertebrates ». Environmental Pollution 305 (juillet): 119290. https://doi.org/10.1016/j.envpol.2022.119290. Pelosi, C., C. Bertrand, G. Daniele, M. Coeurdassier, P. Benoit, S. Nélieu, F. Lafay, et al. 2021. « Residues of Currently Used Pesticides in Soils and Earthworms: A Silent Threat? » Agriculture, Ecosystems & Environment 305 (janvier): 107167. https://doi.org/10.1016/j.agee.2020.107167.