Les enquêtes de noblesse en 1668 et 1717 en Provence impulsent une nouvelle conception de la noblesse qui se définit dorénavant par un statut juridique appuyé par des titres authentiques et plus seulement par le mode de vie et la reconnaissance sociale. La noblesse doit ainsi prouver l’ancienneté de son lignage et faire certifier ses titres de noblesse. Par cette nouvelle conception, la monarchie restreint l’entrée dans l’ordre nobiliaire en se voulant seule créatrice de noblesse. Cela ne signifie pas pour autant que les anoblissements taisibles et les usurpations disparaissent totalement après ces enquêtes de noblesse. Certaines familles tirent en effet profit des ambiguïtés de leur statut et des conceptions nobiliaires afin de justifier leurs prétentions nobiliaires. C’est le cas d’une famille de Haute-Provence, les Durand de Sausses. Originaire d’Annot et descendant d’une lignée de notaires, la famille est anoblie par lettres royales en 1756 en récompense des services rendus au roi parmi lesquels l’exercice des armes. Cette agrégation réussie à la noblesse est le fruit de stratégies employées par la famille depuis le XVIIe siècle. Cet article se propose ainsi de s’intéresser au parcours de cette famille par trois axes : alliances matrimoniales avec des familles puissantes (les Castellane et les Rabier notamment) ; positions de pouvoir au sein d’institutions provinciales et possession de fiefs (Sausses en premier lieu). Une attention particulière sera portée aussi sur la propre représentation de la famille par les titres dont la famille se revendique. Le regard de la famille est révélateur de ses ambitions et renseigne également sur l’acceptation et la reconnaissance sociale de la famille en tant que membre à part entière de la noblesse.