Que nous apprennent les études des catégories sur notre propre discipline ? Ambitieux, interdisciplinaire, à l’intersection de méthodes et des outils conceptuels, le projet SIC invite à se saisir paradoxalement de l’insaisissable du monde, en multipliant les regards, les gestes et les corpus, dans ce qu’il a de processuel, continu, fragmenté – comme nous l’enseigne la pensée d’Héraclite, de Nietzsche, James ou Bergson. On peut ainsi se demander si un tel projet est réalisable. Cela pose plusieurs questions au nombre desquelles : la recherche n’est-elle pas en avance sur les formations pédagogiques et scientifiques et donc sur nos capacités à répondre aux ambitions du projet ? Celles-ci ne dépassent-t-elle pas nos capacités institutionnelles, pédagogiques, voire sensorielles ? N’expliquent-t-elles pas que nous ayons tant de mal à exister médiatiquement et sur la scène scientifique ? La complexité du projet, sa situation (entre les disciplines, entre les objets, entre les mondes) ne le rendent-elles pas invisible, inintelligible, débile pour des dispositifs sociaux, médiatiques et administratifs qui reposent sur des ontologies fixes et ont des nécessités pratiques et économiques indexées sur ces ontologies (classifier, lister, programmer, affecter, exploiter) ? Les SIC ne sont-elles pas une utopie épistémologique ?