La fouille programmée de 2015 dans la parcelle BM 315, au numéro 2 de Rue Kléber, Néris-­les-Bains (Allier 03), s'inscrit dans le PCR Neriomagus/Aquae Nerii, commencé en 2011. Elle a été précédée par des sondages de fouille effectués en 2013 et par une première campagne de fouille programmée en 2014. L'ensemble de ces opérations a été coordonnée, depuis 2011, par Carlotta Franceschelli (MCF en Histoire et archéologie romaine à l'Université de Clermont), avec la collaboration stable d'une équipe de l'Université de Bologne (Italie), coordonnée par Pier Luigi Dall'Aglio (Professeur de Topographie antique et Archéologie du paysage). Il s'agit d'un secteur concerné par plusieurs découvertes dans le courant du XIXe s. (L. Esmonnot), lorsqu'une série de bâtiments d'une certaine envergure monumentale, interprétés à l'époque comme les restes du castellum principal de l'aqueduc et d'un temple, ont été mis au jour. Les sondages que nous avons conduits en 2013 et les deux campagnes de fouille programmée que nous avons effectuées en 2014 et 2015 nous ont permis de constater la présence, dans le sous-sol de la parcelle située au 2bis de la rue Kléber, d'une partie de la structure interprétée par Esmonnot comme un château d'eau, et que nous avons appelée structure l. Ces premières années de recherche nous ont également permis d'en définir la chronologie et de progresser dans la compréhension de sa fonction. Une fouille stratigraphique fine, conduite à la main, a en effet montré que cette structure a été réalisée vers le milieu du Ile s. ap. J.-C. et qu'elle a fait l'objet d'un arasement systématique, pour récupération du matériel de construction, vraisemblablement déjà dans le courant de l 'Antiquité, à une date qu'à l'état actuel des connaissances il n'est pas possible de préciser. Sur le plan structurel, la fonction hydraulique, liée à la distribution de l'eau en ville, qui avait été proposée au XIXe s., a été écartée. Il s'agit en revanche d'un grand complexe monumental, conservé seulement dans ses niveaux de fondation ou de chantier, avec quelques rares restes de ses élévations. Il devait s'articuler en trois parties, permettant de relier la partie basse de la ville au sommet du plateau. D'ouest en est, cette structure se composait d'abord d'un dispositif d'accès sous forme d'allée rectiligne, large d'environ 7 m et longue d'au moins 36 m, qui devait permettre de franchir le dénivelé soit par le biais d'une rampe, soit par paliers successifs, reliés par plusieurs blocs de marches (partie 1B/C). Suivait un premier espace, avec plan en U légèrement ouvert vers l'est (partie lA), qui devait à son tour donner accès à la dernière partie du complexe, actuellement développée sous la rue Kléber et les maisons situées à l'est de cette voie (partie l D). Les découvertes du XIXe s., qui évoquent la présence d'un temple à cet endroit, pourraient appuyer l'hypothèse d'une fonction religieuse pour l'ensemble de structure 1. La fouille de 2015 a également permis de préciser le caractère pluristratifié du site du Péchin et la chronologie de ses différentes phases d'occupation. C'est ainsi que la grande structure en terrasses (structure 1) a été attribuée à la dernière phase d'occupation antique du site (phase 2), qui commence vers le milieu du IIe s. ap. J.-C. Elle a été bâtie sur les restes d'une phase d'occupation antérieure, que nous avons appelée phase 1. Datée entre le milieu du Ier s. ap. J.-C. et les premières décennies du IIe s., elle se caractérise par la présence de structures réalisées avec un mélange de matériaux durables, dans les fondations des murs (pierre), les sols (mortier de chaux) et les toitures (TCA), et périssables, notamment dans les élévations des murs (argile crue). Parmi les structures de cette phase, se signale un bloc en pierre de forme presque carrée (USC 3127), grossièrement travaillé sur ses côtés et caractérisé par des traces d'usure importantes sur sa face supérieure. Découvert lors de la campagne de 2014, si sa chronologie de phase 1 ne fait pas de doute, son interprétation fonctionnelle demeure en revanche incertaine (base de statue ou d'autel ? fondation de pilastre ?). Pour ce qui est de la fonction générale des structures de phase 1, la découverte, en 2015, de mobilier à possible destination votive, tels plusieurs fragments de statuettes en terre blanche de l'Allier (parmi lesquelles deux Vénus anadyomènes, quelques œufs et un probable cheval), ainsi que des anneaux en bronze et des jetons en os, pourrait appuyer l'hypothèse d'une destination cultuelle aussi pour ces structures. Dans ce cas, nous serions en présence d'une continuité fonctionnelle entre les 2 phases majeures d'occupation du site, tout au long du Haut-Empire. Les quelques approfondissements que nous avons pu effectuer au-dessous des structures de phase 1, nous ont permis de découvrir des séquences stratigraphiques caractérisées par l'abondance de charbons et par des couleurs oscillantes entre le gris foncé/noir et le rouge, qui attestent la proximité avec un feu intense et prolongé. Il s'agit des premières traces d'occupation actuellement attestées pour cette parcelle et que nous avons qualifiées de phase O. Ces niveaux, formés à partir de la première époque augustéenne, reposent directement sur le sol naturel et se développent jusqu'au milieu du Ier s. ap. J.-C. Pour le moment, ils n'ont pas restitué d'éléments structurels certains, si ce n'est pour des sortes de petits radiers, constitués de menus fragments de pierre, de forme irrégulière et de dimensions centimétriques, partiellement fusionnés par l'action de la chaleur, dont la fonction reste pour le moment difficile à préciser. En conclusion, la fouille du Péchin, avec ses trois phases majeures d'occupation, enrichit à plusieurs titres nos connaissances sur l'histoire antique de Néris. En premier lieu, la réalisation d'un grand complexe à probable vocation cultuelle, au milieu du IIe s. apr. J.-C., renforce l'idée d'un essor monumental du vicus à cette époque. Deuxièmement, la découverte de deux phases d'occupations antérieures, qui descendent au moins jusqu'à l'époque augustéenne, nous offre des éléments de réflexion pour, à terme, essayer d'éclaircir la question des origines de l'habitat antique de Néris.