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Dossier : Noblesses et Ordres militaires. Réseaux, familles, pouvoirs

La noblesse urbaine à travers les procès de l’ordre de Malte. L’exemple du second ordre toulousain (xvie-xviie siècles)

Urban Nobility Through the Order of Malta’s Process of Nobility
Laure Bagneris
p. 93-107

Résumés

Jusque dans les années 1990, beaucoup de chercheurs pensaient que la noblesse avait quitté les villes à la fin du Moyen Âge, y retournant seulement au xviie siècle. Les nobles auraient été chassés par l’arrivée au pouvoir d’une nouvelle élite, la bourgeoisie. De nouveaux travaux montrent que ces conclusions doivent être nuancées. Des sources inédites, comme les procès de noblesse de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem, permettent de changer notre regard sur ce champ particulier de l’histoire sociale de la première modernité. En effet, les présentés devaient prouver la noblesse de leur famille à travers des témoignages et des preuves écrites, remontant parfois fort loin dans leur généalogie. Parmi ces enquêtes, celles du Prieuré de Toulouse n’ont jamais été étudiées de façon exhaustive. En analysant la composition et les pièces de 22 dossiers, nous avons relevé des éléments sur le mode de vie, les stratégies et les identités des familles nobles toulousaines. Ce travail montre que, loin d’avoir disparu, la noblesse de cette riche et puissante ville a résisté et connu des mutations comparables à celles des autres groupes nobiliaires urbains. Cela nous permet aussi de saisir ce qui fait la spécificité du second ordre toulousain, sa composition, son fonctionnement. Nous pouvons aussi esquisser des pistes de recherche concernant les réseaux qui liaient ces familles entre elles.

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Texte intégral

  • 1  Charles Loyseau, Traité des Offices, cité par Philippe Hamon, « Les nobles et la ville : du jeu de (...)
  • 2  Voir Thierry Dutour (dir.), Les nobles et la ville dans l’espace francophone…, op. cit.
  • 3  L’expression est de Philippe Contamine (Philippe Contamine (dir.), L’État et les aristocraties xii(...)
  • 4  Ellery Schalk, L’épée et le sang : une histoire du concept de noblesse (vers 1500-vers 1600), Seys (...)
  • 5  Robert Descimon, « Sites coutumiers et mots incertains : la formation de la noblesse française à l (...)

1Pour Charles Loyseau, la noblesse urbaine, c’est-à-dire ayant fait de la ville son lieu de résidence ordinaire et y exerçant une fonction ou une profession, est « une noblesse honoraire impropre et imparfaite que par mépris on appelle noblesse de ville qui, à la vérité est plutôt bourgeoise »1. On a longtemps pensé que les familles de chevaliers citadins disparaissaient entre le xiiie et le xive siècle, au moment de l’apparition des communes à cause desquelles, soumis à la concurrence de la bourgeoisie, sans accès au pouvoir politique, elles se seraient repliées sur leurs seigneuries rurales d’où elles ne seraient sorties qu’au xviie siècle. Cette conception est battue en brèche depuis trente ans2. Les villes, lieux de passage obligés pour toutes les élites, deviennent le creuset du changement d’identité que connaît la noblesse au xvie siècle. En effet, parmi les travaux de la fin du xxe siècle consacrés à la noblesse et à la chevalerie, certains montrent que le xvie siècle fut une époque cruciale pour l’identité nobiliaire, au point de parler d’un « renouveau aristocratique »3. Il est certain que la multiplication des traités de noblesse4 traduit un effort de définition à la fois juridique et sociale de la noblesse, effort bien nécessaire, tant ce terme de « noble » est polysémique et imprécis5. Cette définition est d’autant plus cruciale que les rois de France, dans leur souci de trouver toujours plus de subsides, commencent, au xvie siècle, à légiférer sur l’anoblissement puis à partir du début du xviie siècle, à ordonner des « enquêtes de noblesse » afin de débusquer ceux qui ne payent pas les impôts.

  • 6  À l’exception notable du travail de Robert Forster, The Nobility of Toulouse in the 18th century : (...)

2La ville de Toulouse, grand centre marchand du Moyen Âge, lieu du deuxième parlement du royaume de France est un des creusets de ces transformations de l’identité nobiliaire. Peu d’études existent en ce qui concerne le second ordre toulousain6, sans doute à cause d’une certaine répugnance à accoler les termes de « noblesse » et de « ville ». Pourtant, les procès de noblesse de l’Ordre de Malte, qui possède un grand-prieuré à Toulouse attirant la meilleure aristocratie du sud-ouest de la France, permettent d’appréhender les différents groupes nobiliaires toulousains et ce qui les unit ou les divise.

  • 7  Antoine du Bourg, Histoire du Grand Prieuré de Toulouse et des diverses possessions de l’Ordre de (...)

3L’ordre de Saint-Jean de Jérusalem est présent dans la capitale languedocienne depuis 11107. Mais ce n’est qu’à partir de 1315 que ce lieu revêt une importance particulière. Les Hospitaliers ont en effet bénéficié de la dissolution de l’ordre des Templiers et pris possession de ses commanderies, dont beaucoup se trouvent dans le Sud-Ouest. La Langue de Provence est donc divisée entre deux grands prieurés, celui de Saint-Gilles et celui de Toulouse. Chaque « présenté » doit prouver la noblesse de ses ascendants sur cent, puis cent seize ans. Cette procédure, inaugurée en 1433, se complexifie durant les xvie et xviie siècles.

  • 8  Anne Brogini et Germain Butaud, « Prouver sa noblesse de nom et d’armes. Fonctionnement et enjeux (...)

4À travers l’étude des procès de noblesse, on peut suivre l’évolution de l’identité nobiliaire. Durant les xve et xvie siècles, les enquêtes sont essentiellement composées de témoignages qui attestent de la qualité noble et de la légitimité du candidat, de ses parents et grands-parents. Les questions portent surtout sur le mode de vie de la famille et sur sa religion. Ceci reflète une époque où la noblesse est essentiellement question de mode de vie et de réputation, où l’anoblissement « taisible » est souvent la règle. En 1603, au moment où les rois de France commencent leurs enquêtes de noblesse, le grand-maître Alof de Wignacourt met en place la procédure définitive : les chevaliers doivent prouver cent ans de noblesse, et cela pour le côté maternel aussi, ainsi que pour les grands-mères, arrières grands-mères et bisaïeules. Cette exhaustivité est renforcée par l’exigence de preuves écrites, bien que les témoignages restent fondamentaux8. Ces actes, essentiellement des contrats de mariage et des testaments, prouvent la légitimité des chevaliers et de leurs ancêtres, alors que le sang, l’appartenance à une lignée deviennent le principal critère pour revendiquer le statut de noble. L’autre partie des preuves concerne surtout les rôles assumés par le second ordre, car ces fonctions peuvent fonder la noblesse et permettent surtout d’assurer le train de vie et d’éviter la dérogeance. Les contrats de mariage et les testaments chez le notaire sont une pratique largement répandue à Toulouse. Les actes sont vérifiés par deux commissaires nommés par le chapitre et cités dans le procès-verbal par un secrétaire, bien souvent un notaire. La diversité des secrétaires explique que la qualité et la quantité des informations collectées varient d’un dossier à l’autre.

5Ces preuves écrites sont l’occasion de saisir quantité de détails sur la vie de la noblesse toulousaine. Elles permettent d’établir des généalogies, de deviner des réseaux de parenté et les stratégies utilisées par ces familles pour conserver leur statut. Nous avons étudié 22 procès de noblesse de l’ordre de Malte, compris entre 1555 et 1766. Ces familles sont bien implantées dans le Grand-Prieuré de Toulouse car elles ont donné plusieurs chevaliers à l’Ordre. Nous les avons choisies sur la base de leur présence géographique avérée (hôtels particuliers, noms de rue, toponymes) et des listes d’officiers et de capitouls portant leur nom, prouvant que ces familles, quelle que soit l’origine de leur noblesse, sont impliquées dans la vie publique et connues en ville.

La ville comme lieu d’anoblissement

Une présence discrète de la noblesse traditionnelle

6Il n’est pas lieu, ici, de nier que la majorité des nobles vivent à la campagne et que l’anoblissement y est plus facile. Cet anoblissement « taisible » est atteint en trois ou quatre générations, avec l’achat d’une ou plusieurs seigneuries et l’adoption d’un mode de vie noble. On peut le deviner à travers les procès, par l’utilisation des « brefs de dispense » pour les preuves d’un « quartier » de noblesse. Par exemple, dans le dossier de Jean Baptiste Louis de Chalvet de Rochemonteix, fils et petit-fils de sénéchaux de Toulouse, on peut lire :

  • 9  Archives of the Order of Malta [AOM] 3636B, f. 11v, procès de Jean Baptiste Louis de Chalvet de Ro (...)

Bref accordé par notre Saint Père, Le Pape Clément XIII le Septième […] dispense le prétendant de prouver la noblesse des familles de Jouglas de Paraza dont est issue la bisaïeule maternelle et celle du Bosc du côté paternel […]9.

7Cette manœuvre vise notamment à cacher que l’un des arrière-grands-pères est apothicaire, bien que seigneur de Servière et de Calmette dans la région de Montpellier.

  • 10  Cette illustre famille chevaleresque a laissé un fonds privé aux Archives départementales de Haute (...)

8D’ailleurs la présence de la « noblesse traditionnelle » à Toulouse est attestée par les procès de noblesse. Les nobles viennent souvent en ville pour surveiller la vente des produits de leurs seigneuries, pour signer des actes chez le notaire. Peut-on pour autant dire qu’ils font partie de la noblesse urbaine ? La réponse est oui. Beaucoup d’entre eux exercent des fonctions au sein de la ville. Plusieurs Potier de la Terrasse10 deviennent par exemple conseillers au Parlement de Toulouse. De plus, l’encadrement militaire, durant toute la première modernité, dans une ville proche de la frontière espagnole, est confié en priorité à la noblesse ancienne. Ce groupe « nobiliaire », composé de nobles dont le statut, ancien ou non, a été obtenu de façon traditionnelle, par l’exercice des armes ou par la détention de droits seigneuriaux et de terres, est certes peu nombreux numériquement, mais il est une constante entre les élites urbaines du Moyen Âge et celles de l’époque moderne. Ses membres sont appelés « noblesse d’épée » à partir du xviie siècle.

La « noblesse de robe », fille du milieu urbain

  • 11  Archives Départementales de Haute-Garonne [ADHG], G 37 J3, Fonds Privé Buisson d’Aussone, procès d (...)
  • 12  C’est le roi Henri II qui officialise cette noblesse en 1552 : « tous et chacun les capitouls qui (...)
  • 13  Arlette Jouanna, « Perception et appréciation de l’anoblissement dans la France du xvie siècle et (...)
  • 14  ADHG, 37 J3, Fonds privé Buisson d’Aussone, f. 15r, procès de Mathieu de Buisson d’Aussone, 1615. (...)
  • 15  Alexandre du Mège, Histoire des institutions religieuses, politiques, judiciaires et littéraires d (...)
  • 16  Ceci n’est pas mentionné dans le procès de noblesse de son arrière-petit-fils, pour des raisons év (...)

9Le second groupe nobiliaire (la « noblesse de robe ») composé de noblesse d’office et de cloche, forme réellement une noblesse urbaine, née de la ville et d’elle seulement. À Toulouse, où le commerce du pastel luit de ses derniers feux au xvie siècle, la plupart des chevaliers étudiés ont au moins un ancêtre marchand ou banquier. Le chevalier Mathieu de Buisson11 descend de l’union de deux lignées de commerçants, les Buisson et les Bernuy. Une fois enrichis, ces bourgeois briguent le chaperon de capitoul. C’est là une des spécificités du recrutement nobiliaire de cette ville, qu’on ne trouve nulle part ailleurs dans le royaume, hormis à Lyon. Les édiles, élus pour un an, sont officiellement anoblis avec leurs épouses et enfants, pourvu que ces derniers renoncent aux activités dérogeantes12. Cette « noblesse de cloche » est très présente dans les procès de noblesse, les certificats d’exercice de fonction capitulaire étant parmi les plus anciennes preuves fournies par les présentés. Leur grand nombre semble dénoter une certaine fierté de cette fonction, contrairement à la fonction de secrétaire du roi, peu mise en avant dans les enquêtes, et surnommée « savonnette à vilain »13. Elle est souvent recherchée car un capitoul peut continuer son activité professionnelle. Ceci explique que les Buisson aient assuré cette responsabilité à de nombreuses reprises14. Le premier, Hugues, capitoul en 1444 et 1468, est mentionné sans titre, tandis que le suivant, aussi prénommé Hugues, en 1482 est qualifié de « seigneur de Mirabel »15. Jean Buisson, capitoul en 1515 et 1542 et arrière-grand-père du présenté, est aussi marchand de pastel16.

  • 17  Jean-Marie Constant, « La noblesse “de ville” au xvie siècle. Deux modèles provinciaux : l’Orléana (...)
  • 18  Anne-Marie Cocula, « Formation et affirmation d’un patriciat : le Parlement de Bordeaux au xviie s (...)

10De même l’obtention de la noblesse par l’exercice de charges parlementaires est souvent mise en avant par les familles des présentés. En effet, un parlementaire devient noble s’il exerce cette fonction plus de vingt ans, ou s’il meurt durant ce laps de temps. Si son fils suit le même chemin ou décède de même, la lignée est anoblie. Beaucoup de marchands font faire des études de droit à leurs fils, et, le moment venu, leur achètent une charge. Ces preuves sont jugées assez importantes pour figurer dans beaucoup de procès de noblesse et, chaque fois, les secrétaires notent le nombre d’années dans la fonction ou le décès durant son exercice. Le poids grandissant des offices, notamment au Parlement, entraîne d’ailleurs une modification durable de la structure de la noblesse toulousaine et permet à ses membres les plus récents de mettre une distance avec le passé bourgeois de la famille. La noblesse toulousaine du xviie siècle, pour paraphraser Jean-Marie Constant, est « fille des offices »17. Il est intéressant de la comparer en cela à la noblesse bordelaise. Ville de Parlement également, mais moins précoce que Toulouse, Bordeaux conserve, elle, véritablement une identité mixte, entre noblesse d’office et noblesse marchande. En effet, alors que le commerce toulousain du pastel périclite, entraînant une mutation du second ordre, le commerce bordelais, fondé sur les échanges atlantiques, continue à enrichir une frange de la population qui est ensuite anoblie18.

Les relations entre les différents groupes nobiliaires

  • 19  AOM 3634A, f. 38r., procès de Jean François Pascal Henry Du Bourg, 1747.

11Ces parlementaires et ces capitouls, malgré leurs luttes inévitables pour le contrôle de la ville, forment un second groupe nobiliaire, numériquement plus nombreux à Toulouse, car leurs fonctions exigent une présence quotidienne en ville. On peut les appeler « noblesse de robe » puisque c’est ainsi qu’ils sont appelés à partir du xviie siècle. En effet, il est impossible de démêler la « noblesse d’office » de la « noblesse de cloche », tant ces fonctions sont exercées successivement au sein de mêmes familles, voire par un même individu. Ainsi, lors du défilé des obsèques de François Ier, on voit participer Raymond d’Alièz, ancêtre direct de Jean François Pascal Henry Du Bourg19, qui est capitoul lors de ses obsèques puisqu’il a été élu pour la seconde fois en novembre 1546. Il était également docteur en droit et son fils, Jean d’Alièz fut conseiller au Parlement et capitoul.

  • 20  François Bordes, « Rites et pratiques cérémonielles à Toulouse au Bas Moyen Âge et à la Renaissanc (...)
  • 21  Martin Wrede, « De la haute noblesse à la semi-noblesse. Forme d’existence nobiliaire en Europe au (...)

12Ces noblesses, si différentes par leurs origines, forment-elles un corps urbain ? L’examen des processions donne un début de réponse. Lors des entrées royales, dont l’ordonnancement est connu à partir de celle de François Ier en 1533, ils défilent séparément : les capitouls tiennent le dais qui surplombe leur hôte, avec derrière eux le haut clergé, le cortège du Parlement, celui des officiers royaux et gentilshommes de la sénéchaussée et enfin, les nobles tenant fief. Chaque partie est clairement identifiée et connaît sa place. Il est intéressant de noter d’ailleurs qu’en 1533, deux oriflammes précèdent le cortège : l’une pour la ville elle-même, mais portée par un noble issu de la noblesse de cloche, le seigneur Bertrand Ysalguier de Clermont, et une autre pour la noblesse toulousaine. La ville et la noblesse qu’elle produit sont ainsi séparées du reste de la major pars 20. Les deux groupes nobiliaires ne forment pas un seul corps mais une noblesse composite, qui va mêler ses composantes vers la fin du xviie siècle, comme le montrent les arbres généalogiques des chevaliers. À l’instar de Martin Wrede, on peut remarquer qu’ils « constituent moins des corps radicalement distincts que des nébuleuses qui s’interpénètrent »21.

Le devoir de paraître, une obligation partagée par tous les nobles

Vivre dans l’ostentation

  • 22  AOM 3609K, f. 15r., procès de François de Nupces, 1723, provision pour la charge de gentilhomme or (...)

13Est noble celui ou celle qui vit noblement et qui est connu comme menant une vie sans activité dérogeante. Cela ne veut pas dire que la major pars est inactive. Les contrats de mariage ou les testaments cités dans les procès montrent que ces hommes, et parfois ces femmes, sont d’abord seigneurs et, qu’en tant que tels, ils administrent des terres. Ils peuvent aussi exercer une profession au sein du Parlement, de la trésorerie générale de Toulouse ou de l’armée. Plus rarement, ils ont aussi un office auprès du roi, en tant que gentilhomme ordinaire de sa Chambre22. Ces charges sont l’expression des rôles traditionnels de la noblesse : le conseil, la justice, la protection du royaume. Ils permettent aux nobles de vivre confortablement, car un noble a « le devoir de paraître », de pratiquer l’ostentation.

  • 23  Roger Baury, « L’ubiquité nobiliaire aux xviie et xviiie siècle », dans Josette Pontet, Michel Fig (...)
  • 24  AOM 3620J, f. 9v, procès d’Anne d’Aignan d’Orbessan, 1738.

14Celle-ci passe notamment par la pratique de l’« ubiquité nobiliaire »23. Il s’agit de la multiplicité des ancrages spatiaux : à la Cour, pour ceux qui y sont appelés, en ville et à la campagne, pour tous. Au xviie siècle, la sédentarité est considérée comme une tare sociale car cela veut dire que la personne n’a pas les moyens de vivre à la campagne et à la ville. La forme primordiale de cette ubiquité est donc « la double résidence » urbaine et rurale. Roger Baury estime qu’un tiers à 40 % des nobles vivent ainsi au xviie siècle. Cette ubiquité est visible dans les testaments. Le chevalier d’Aignan d’Orbessan fournit un testament de Michel Du Faur de Pibrac, seigneur de Tarabel, trisaïeul du côté paternel24. Celui-ci, passé devant notaire à Toulouse en 1615, précise que le testateur désire être enterré à Toulouse, aux Augustins, s’il décède dans cette ville. Mais sa charge de maître des requêtes ordinaires du roi lui faisant craindre de mourir à Paris, il donne aussi un lieu de sépulture pour ce cas précis. Le testament est ouvert seulement quatre jours après avoir été déposé, ce qui laisse penser que Michel Du Faur est décédé et a été inhumé à Toulouse.

  • 25  Jean-Claude Paulhet, « Les parlementaires toulousains à la fin du xviie siècle », Annales du Midi  (...)
  • 26  AOM 3634A, f. 13v., procès de Jean François Pascal Henry Du Bourg, 1759.

15Les pactes de mariages, si nombreux dans les procès de noblesse, sont une autre source d’information sur les fastes nobiliaires. En effet, les filles y reçoivent leur « légitime », c’est-à-dire la part de l’héritage de leurs parents, qu’elles perçoivent au décès de ces derniers. Les riches parlementaires dotent leurs filles pour attirer un bon parti, mais aussi pour garantir le niveau de vie du jeune couple25. En effet, cette somme est souvent utilisée pour acheter un office au jeune époux. Le seul exemple de contrat citant clairement l’usage de la dot est celui unissant Jeanne de Paulo à Amable Du Bourg en 1559. Il est indiqué que la future mariée reçoit 4 000 livres de dot, une très belle somme pour l’époque, auxquelles s’ajoutent 3 000 livres supplémentaires de la part du promis, en guise d’« augment coutumier », pour « achat de bien ou profit honnête »26. De plus, la dot, au même titre que les invités prestigieux à la noce, est un indicateur du crédit de la famille.

La reconnaissance de la qualité de noble

16L’importance de la réputation et la reconnaissance accordée par les pairs sont aussi des points communs unissant les membres de cette noblesse composite. Elles fondent donc également la recevabilité des enquêtes de noblesse, du moins jusqu’au deuxième tiers du xviie siècle. Les témoins et les contrats de mariage dans les procès nous apportent un éclairage sur la reconnaissance, par les pairs de la noblesse, de la lignée du présenté.

  • 27  Comme le font remarquer Anne Brogini et Germain Butaud, si les familles des témoins n’étaient pas (...)
  • 28  ADHG, H 204-12, procès de Jean de Lagorrée, 1555, non folioté.
  • 29  Louis de La Roques, Catalogue des Chevaliers de Malte, appelés successivement Chevaliers de l’Ordr (...)
  • 30  Bertrand d’Ysalguier fut élu en 1530 et Jacques de Lagorrée en 1542 (voir Alexandre du Mège, Histo (...)

17Les témoins des procès de noblesse sont des hommes qui certifient la bonne moralité du présenté et de sa famille, ainsi que sa naissance légitime et le mode de vie noble de la lignée, parfois sur plusieurs générations. Ils sont souvent liés aux Hospitaliers, car leurs familles ont donné à l’Ordre des chevaliers. Ces gentils-hommes sont censés ne pas avoir de liens familiaux entre eux ou avec la famille du présenté ; dans les faits, ce n’est pas toujours possible27. Jacques de Lagorrée, banquier changeur et capitoul, est le père du chevalier Jean de Lagorrée, reçu en 155528. Sa noblesse est réelle car il a été capitoul. Mais son ancienneté est sujette à caution. Les cinq témoins sont Odet de Benque, François de Saint Gilis, Bernard d’Ysalguier, Jean de Rigaud et Jacques Dussuer. Les familles des premier et quatrième témoins sont connues de l’Ordre29. Au moins l’un d’entre eux, Bertrand d’Ysalguier, est un ancien capitoul, comme Jacques de Lagorrée. Tous deux ont été élus pour le capitoulat du Pont Neuf30. De plus, les anciens capitouls font partie du collège d’électeurs qui choisissent les nouveaux édiles. Les deux hommes se côtoient donc de façon régulière. Il en va de même pour François de Saint Gilis qui est commissaire aux guerres, alors que le père du présenté a été commissaire de l’artillerie. Ces témoins insistent sur la noblesse de Jacques de Lagorrée et sur les hautes fonctions qu’il occupe.

  • 31  Le procès du chevalier de Lagorrée (ADHG H 204-12, procès de Jean de Lagorrée, 1555, non folioté) (...)
  • 32  ADHG, 37 J 3, Fond Privé Buisson d’Aussone, f. 11v-15r, procès de Mathieu de Buisson d’Aussone, 16 (...)

18La réception dans un ordre chevaleresque, qu’il soit royal, comme l’ordre du Saint-Esprit ou religieux, comme l’ordre de Malte, est non seulement une preuve de reconnaissance nobiliaire, mais peut aussi permettre aux descendants de ces chevaliers de prouver leur appartenance au second ordre31. L’ordre de Malte mène une enquête extrêmement rigoureuse sur les chevaliers et demande huit quartiers de noblesse pour les deux côtés de la généalogie. Les commissaires sont des chevaliers ayant suivi le même processus de sélection, qui vérifient minutieusement les preuves déposées par la famille. Si l’on prend l’exemple du chevalier de Buisson, on voit les commissaires visiter les tombeaux familiaux aux Augustins et aux Cordeliers, décrire les armoiries et les peintures sur l’autel des chapelles, vérifier les actes dans les minutes des notaires et la présence d’ancêtres capitouls dans les Annales de l’Hôtel de Ville32.

  • 33  AOM 3608B, f. 4v., procès de Pierre Paul de Rochechouart de Clermont, 1715.

19Dans les contrats de mariages aussi, la reconnaissance nobiliaire entre pairs est perceptible. En effet, les familles des promis rivalisent sur les titres et les seigneuries, insistant pour que les notaires les notent. Prenons l’exemple du pacte conclu entre Henry Gaston de Foix et Jeanne de Pardaillan en 162433. Les deux époux sont issus de lignées d’épée prestigieuses. Le fiancé est « haut et puissant seigneur Messire Henry Gaston de Foix marquis de Fournets, comte de Rabat, vicomte de Massac, seigneur des baronnies de Monneleu, La Roque, Lagardiolle, conseiller du Roi en son Conseil d’État, capitaine de 100 hommes de ses ordonnances » tandis que son beau-père est « haut et puissant seigneur Messire Antoine Arnaud de Pardaillan, chevalier des ordres du Roi, capitaine de 100 hommes d’armes, premier maréchal de camps, lieutenant général de Guyenne ».

  • 34  Sébastien Jahan, « Parenté et stratification sociale. Les témoins aux contrats de mariages dans la (...)
  • 35  ADHG, H 204-13, 4e cahier, f. 52v, procès de André de Lamamye, 1662.

20Une autre façon de montrer son prestige est le nombre et la qualité des témoins présents à la signature du pacte34. Les secrétaires ne s’attachent pas toujours à en recopier la liste pour la plupart des enquêtes étudiées. Mais lorsqu’ils le font, on se rend compte qu’ils sont nombreux et qu’ils rehaussent le prestige des lignages. Ainsi, dans le procès Lamamye, on peut noter pour l’alliance de Philibert André de Forest de Carlinéas et Pierrette de Sauvin en 1614 la présence de nombreuses connaissances professionnelles du futur époux, exerçant une charge au Parlement ou dans la haute administration35. Leur présence prouve l’entregent des parents des futurs époux et leur signature, l’approbation d’une alliance qu’ils jugent convenable. C’est reconnaître que les deux lignées sur le point de s’unir ne commettent pas de mésalliance et respectent les usages nobles en termes de patrimoine.

Des stratégies communes aux deux groupes nobiliaires

Bien se marier

21Conserver sa noblesse, mais aussi augmenter le patrimoine qui garantit son mode de vie, sont les soucis de toute famille noble, et les procès de noblesse de l’ordre de Malte illustrent ces stratégies.

  • 36  Jean-Marie Constant, « Les structures sociales et mentales de l’anoblissement : analyse comparativ (...)
  • 37  ADHG, H 204-13, 4e cahier, procès de André de Lamamye, 1662, f. 48r, union Lamamye/Forest Carlinéa (...)
  • 38  ADHG, H 204-13, 3e cahier, procès de Claude Jacques de Lamamye de Clayrac, 1737, f. 41v, union Cla (...)

22Pour les unions, on peut relever trois tendances durant la première modernité : l’homogamie sociale, l’hypergamie masculine et l’endogamie géographique. En ce qui concerne l’homogamie sociale, « la noblesse de robe » domine l’oligarchie toulousaine, tisse de nombreuses alliances entre les nombreuses familles qui la composent, mais aussi avec la noblesse traditionnelle. Aucune des familles étudiées n’est seulement de noblesse traditionnelle ou de noblesse de robe. Elles partagent toutes un même objectif : durer36. Ces prérequis posés, nous devons tout de même remarquer qu’au xvie siècle, l’homogamie, c’est-à-dire le mariage dans le même milieu social, prévaut. Le mélange entre les noblesses, visible sur les arbres généalogiques des chevaliers, est plutôt un résultat des alliances des xviie et xviiie siècles. En effet, dans la famille de Lamamye, nous avons la chance d’avoir deux procès de noblesse conservés. En 1662, le grand-oncle, André, présente majoritairement des contrats de mariage concernant des familles de robe : sur les huit contrats référencés, cinq concernent des unions homogames entre « robins »37. Son petit-neveu, en 1737, met l’accent sur la noblesse d’épée en fournissant les enquêtes de noblesse de Jacques, Clément, Louis et Louis de Clayrac en 1667, qui ne comportent que des pièces justifiant une noblesse traditionnelle. Parmi ces pièces, il y a quatre contrats de mariages concernant des unions homogames dans la noblesse d’épée38. Cet exemple nous montre que, si l’homogamie est en effet la règle au xvie et début xviie siècle, l’identité d’une famille est mouvante : elle peut, dans un premier temps, s’identifier à la noblesse de robe et appliquer la stratégie adéquate, puis s’agréger à la noblesse d’épée et changer sa politique matrimoniale.

  • 39  Jérôme Luther Viret, Le Sol et le Sang, La famille et la reproduction sociale en France du Moyen  (...)
  • 40  AOM 3634A, f. 13v, procès de Jean François Pascal Henry Du Bourg, 1759.
  • 41  Ibid, f. 14r, testament de Étienne Du Bourg, 1551.

23L’hypergamie masculine est le « pilier de la construction féodale »39. Elle est remarquable pour la noblesse de robe. Les causes en sont multiples. Tout d’abord, vient le besoin de faire entrer de l’argent frais dans une lignée. Nous avons déjà parlé des dots importantes des demoiselles « robines ». Elles servent à asseoir publiquement la magnificence de leur lignée et à attirer les prétendants. Pour les fiancés, c’est aussi renforcer le prestige de leur propre lignée, qui est assez habile et influente pour négocier une alliance avantageuse. Plus prosaïquement, c’est enfin le moyen d’assurer un certain style de vie, comme nous l’avons déjà vu avec le contrat de mariage d’Amable Du Bourg et de Jeanne de Paulo40. Cette dernière est la fille du second président du Parlement de Toulouse41, alors que son futur époux, fils du maître des requêtes de la reine de Navarre, n’est que « docteur en droit et avocat au Parlement ».

  • 42  Michel Nassiet, La violence, une histoire sociale (France, xvie-xviiie siècles), Seyssel, Champ Va (...)
  • 43  ADHG, H 203-19, procès de Jacques Du Faur de Pibrac, 1627, non folioté.
  • 44  AOM 3634A, f. 75r., procès de Jean François Pascal Henry Du Bourg, 1759.

24L’endogamie est la dernière caractéristique des alliances matrimoniales. Elle s’explique aisément par le statut de capitale régionale de la ville et l’éloignement parisien. En effet, les seules alliances en dehors du Languedoc sont celles de familles ayant connu un destin « national », l’exogamie permettant la circulation de l’honneur : être accepté par une famille étrangère à la région veut dire qu’on a une renommée suffisante42. Les Du Faur de Pibrac en sont le meilleur exemple. Guy Du Faur de Pibrac épouse Jeanne de Custos, dame de Tarabel, héritière de cette seigneurie. Il fait une carrière brillante, qu’il termine en tant qu’avocat général au Parlement de Paris et conseiller d’État. Son fils, Michel, gentilhomme de la Chambre du roi, épouse Claude d’Étampes, dont la noblesse est certifiée dans ce qu’il reste du procès de noblesse de leur fils, Jacques Du Faur de Pibrac43. La mère étant née hors des limites du prieuré, on ne peut trouver de témoins fiables pouvant attester la réputation de la famille. C’est d’ailleurs ainsi que le chercheur peut repérer les unions qui dépassent le cadre géographique. Les ancêtres non nés dans les limites du prieuré de Toulouse doivent être l’objet d’une enquête séparée. Dans les procès étudiés, ce cas n’est rencontré que pour la grand-mère maternelle du chevalier Du Bourg, Jeanne de Brunet Villeneuve, née à Béziers44. Cette rareté montre que l’endogamie est très répandue.

Transmettre le nom et le patrimoine

  • 45  Firmin Laferrière, Essai sur les anciennes coutumes de Toulouse, Toulouse, Bonnal et Gibrac, 1855.
  • 46  Michel Taillefer, Vivre à Toulouse sous l’Ancien Régime, Paris, Perrin, 2000, p. 281.

25La transmission du patrimoine est réglée par la coutume de Toulouse, héritière du droit écrit romain. Établie en 1285, elle laisse au testateur l’entière liberté de la répartition de ses biens et du choix du ou des enfants comme héritier(s), pourvu qu’il réserve une « légitime », qui doit être égale ou supérieure à « cinq sols toulousains » à ses autres enfants45. Les procès ne précisent que fort rarement le nom des terres ou maisons qui sont transmises par héritage. Les notaires préfèrent noter les modalités de succession. La désignation d’un héritier « général et universel » est la plus courante dans les testaments cités dans les procès de noblesse. Les enfants ainsi désignés le sont souvent dès le contrat de mariage des parents. En effet, on se rend compte que les contrats de mariages règlent minutieusement les obligations financières et patrimoniales des époux et contiennent aussi des clauses successorales46. La plupart des temps, l’héritier reçoit la moitié ou le tiers des biens de ses parents, le reste étant transmis aux frères et sœurs pour favoriser leur établissement.

  • 47  AOM 3608B, f. 3v., procès de Pierre Paul de Rochechouart de Clermont, 1715.
  • 48  Jonathan Powis, « Aristocraties et bureaucraties dans la France du xvie siècle : État, office et p (...)
  • 49  La Paulette était un droit annuel payé par les détenteurs d’un office pour pouvoir transmettre leu (...)
  • 50  AOM 3609K, ff. 7r.-7v., procès de François de Nupces, 1721.

26Il est intéressant de noter, qu’à part dans le contrat de mariage d’Antoine de Rochechouart et de Catherine de Barbezan en 151747, le rang de naissance n’est pas indiqué. Cela permet de ménager l’avenir, au cas où le premier fils soit en trop mauvaise santé pour se marier à son tour ou choisisse d’entrer dans le clergé séculier. Dans les faits, c’est le plus souvent la primogéniture mâle qui s’impose. Parmi les biens transmis, les offices parlementaires sont particulièrement importants car, outre les revenus qu’ils génèrent, ils sont aussi la preuve du pouvoir des lignages48. Si on observe les provisions des offices des 65 parlementaires conservées dans les procès, on se rend compte que cette patrimonialisation des offices est très répandue. Ainsi, le dossier du chevalier de Nupces permet de suivre la transmission d’un office sur six générations, de 1504 à 1659, et montre que, même avant 1604 et l’instauration de la Paulette49, la survivance est un phénomène bien ancré dans la noblesse de robe50.

  • 51  AOM 3634A, f. 13r., procès de Jean François Pascal Henry Du Bourg, 1759.

27L’établissement des cadets par le mariage, l’entrée dans les ordres ou le choix d’une profession ont pour double but d’éviter la partition du patrimoine du lignage et d’affirmer le prestige de la famille. Ces choix sont communs à la noblesse de robe, comme à la noblesse d’épée. Les filles sont mariées et reçoivent leur « -légitime » en guise de dot. D’ailleurs, les testaments de leurs parents les nomment uniquement pour rappeler ce versement. Dans le testament d’Amable Du Bourg, fait devant notaire en 1602, ses filles Marie, Magdeleine et Jeanne Marguerite sont citées comme ayant reçu leur « portion » lors de leur mariage51. Elles reçoivent aussi cet héritage anticipé en cas d’entrée dans les ordres monastiques.

  • 52  Michel Nassiet, La violence, une histoire sociale, op. cit., p. 361-363.
  • 53  Louis de La Roques, Catalogue des Chevaliers de Malte…, op. cit., colonne 181.
  • 54  Jean-Bertrand de Luppé de Garrané, Mémoires et caravanes de Jean-Bertrand de Luppé de Garrané suiv (...)

28Les fils cadets permettent la fondation de branches « militaires » pour la noblesse d’office ou de branches « robines » pour la noblesse traditionnelle, fournissant des héritiers « de secours », si la branche aînée vient à faillir52. Ils peuvent aussi intégrer les rangs du clergé et l’une des formes les plus prestigieuses de cette carrière est bien sûr l’entrée dans l’ordre de Malte. Des dynasties, de grand-oncle ou d’oncle à neveu ou petit-neveu, apparaissent alors. L’exemple des Paulo est parlant. Le seul dossier concernant directement cette famille, celui de François de Paulo, présenté en 1670, est bien peu bavard. Mais ceux des candidats des familles collatérales le sont plus. Ainsi, on sait que les Paulo prirent l’habitude de présenter des fils à quasiment chaque génération, entre 1571 et 169153. On pense notamment au grand-maître Antoine de Paule/o (1623-1636), dont la renommée dispensa ses descendants de payer le droit d’entrée dans l’Ordre. Comme ils représentent des « héritiers de secours » en cas de décès de leur aîné, ils peuvent aussi se défroquer. De tels cas ne sont pas rares. Dans ses Mémoires, Jean-Bertrand de Luppé de Garrané, chevalier de Malte depuis 1600, évoque la mort précoce de son frère aîné et la proposition que lui fait son père de quitter l’habit. Satisfait de son sort et comptant quatre frères après lui, il décline l’offre54.

Avoir les bonnes relations

29La mise en place de ces stratégies implique des connexions avec le reste de la société, particulièrement entre pairs. Faire entrer un fils ou une fille dans l’ordre de Malte demande d’abord aux familles de donner les noms de témoins fiables parmi la noblesse de la région. On peut se poser légitimement la question des rapports entre ces nobles. Sont-ce des liens confraternels, de voisinage, de clientèle ?

  • 55  Anne Brogini et Germain Butaud, « Prouver sa noblesse de nom et d’armes… », art. cit., p. 47-62.

30Dans le dossier du chevalier de Lagorrée, on peut voir que les cinq témoins entendus sont de la région toulousaine, alors que le père du présenté est du marquisat de Saluces, en Piémont. Lorsqu’ils témoignent de la noblesse de Jacques de Lagorrée, ils s’appuient donc sur ce qu’ils connaissent de lui, ce qu’ils voient : un banquier vivant dans le luxe, ancien capitoul, ce qui veut dire qu’il a assez d’influence et qu’il vit à Toulouse depuis assez longtemps pour se faire élire. Dans la partie orientale de la Langue de Provence, il semble que les témoins sont souvent de noblesse inférieure ou équivalente55. Ici, il semble que ce ne soit pas le cas. Ils sont tous de meilleure noblesse que Jacques de Lagorrée. Ce sont des personnes en vue, dont le témoignage a du poids. Sont-ils les protecteurs de Jacques de Lagorrée ? Comme nous l’avons déjà dit, le premier le connaît en tant que commissaire de l’artillerie, le second comme capitoul qu’il fréquente tous les ans au moment de la désignation des édiles. Mais ce qui peut expliquer le choix de ces hommes comme témoins est aussi la profession de Jacques de Lagorrée. Il est banquier, activité qu’il a continuée après son année de magistrature, car celle-ci autorise la poursuite de son activité. Or, le sieur de Benque n’a que 1 000 livres de rentes, tout comme M. de Saint Gilis. Jacques Dessuer possède 1 200 livres de rentes ; Ysalguier et Rigaud ont chacun 2 000 livres. Ces revenus sont peu élevés. On peut donc penser que les relations de Lagorrée avec ces personnes sont aussi professionnelles. Les témoins sont sans doute ses obligés.

  • 56  Guy Saupin, « Les oligarchies municipales en France sous l’Ancien Régime : réflexions méthodologiq (...)

31Divers systèmes de parenté peuvent coexister au sein de la noblesse urbaine : les dynasties que nous avons déjà évoquées, avec l’exemple du chevalier de Nupces, où plusieurs membres exercent les mêmes responsabilités, ou bien les parentèles. Celles-ci peuvent être horizontales, avec la mise en relation des familles sur la même génération, ou verticales, bâties sur le même principe, mais sur plusieurs générations56.

  • 57  Sylvie Mouysset, « Stratégies lignagères du corps de ville de Rodez aux xvie et xviie siècles », d (...)
  • 58  AOM 3603B, f. 3r., procès de Joseph Jacques de Caulet, 1704 ; AOM 3609K, f. 10r., procès de Franço (...)
  • 59  Michel Nassiet, La violence, une histoire sociale…, op. cit., p. 361-363.

32Dans l’état actuel de nos recherches, nous ne pourrons traiter que du premier type de parentèle. Théoriquement, du fait du faible nombre de familles de la noblesse toulousaine, on peut imaginer un seul réseau de parenté reliant toutes nos familles à cause du petit nombre de partenaires disponibles à chaque génération. Il nous est pour l’instant impossible de conclure à l’existence ou non d’un « super réseau » à l’image de ce que Sylvie Mouysset a identifié pour la ville de Rodez57. Mais certains indices tendent à identifier des systèmes de relations assez étendus entre les familles. Si on ne regarde que superficiellement les procès, en s’intéressant seulement aux quartiers de noblesse, on remarque ces liens familiaux. Par exemple, les bisaïeux paternels du chevalier de Nupces et du chevalier d’Aignan, Jean Georges de Caulet et Jeanne Desplats, sont également les aïeux du chevalier de Caulet58. Si on étudie les procès en détail, outre les mêmes pièces de dossier qui sont versées aux différents procès, on remarque aussi des pratiques matrimoniales qui tissent ou resserrent encore les liens entre les lignages. Les procès Nupces, Caulet et Aignan attestent d’un « échange matrimonial entre lignées alternées »59 entre les Caulet et les Desplats : Jeanne Desplats épouse Jean Georges de Caulet, de la branche aînée de cette famille, en 1635. La jeune femme est la fille de Françoise de Caulet, cousine éloignée de Jean Georges et membre d’une autre branche. Cette union permet de resserrer les liens entre les deux lignées, tout en permettant au futur époux, conseiller au Parlement, d’épouser la fille d’un président du Parlement. On peut donc d’ores et déjà esquisser un réseau reliant les Caulet, les Nupces, les Aignan, ainsi que les Desplats.

Doc. 1. Le réseau familial entre les lignées des chevaliers de Caulet, Nupces et Aignan au xviie siècle

Doc. 1. Le réseau familial entre les lignées des chevaliers de Caulet, Nupces et Aignan au xviie siècle
  • 60  AOM 3613, f. 5v., procès de Marc Antoine de Catelan, 1726.

33Du fait de la forte représentation des Parlementaires dans notre échantillon, ces liens familiaux se doublent souvent de liens professionnels. Ainsi, lorsque Catherine de Benoît épouse Jean de Catelan, trésorier général, elle est accompagnée de ses frères (dont l’un est conseiller au Parlement) et des collègues de celui-ci, Pierre Du Bourg, Philippe de Bertier et François de Catelan, également cousin du futur époux60. Sans doute, les relations professionnelles entre Aymable de Benoît et François de Catelan expliquent cette union.

  • 61  AOM 3608A, f. 5r., procès de Joseph de Hautpoul, 1716.

34Parmi la noblesse traditionnelle, les liens de voisinage aussi peuvent être très forts et entretenus par des invitations aux événements importants. Lors du mariage de Jean de Hautpoul et de Jeanne de Monlaur en 1501, la liste des témoins comprend « Jean de Nègre, seigneur de la Redorte, Guillaume de Renefau seigneur de Pouzols de Brenguiers de Ste Colombe, Tristan de Thesan prieur de Saint Germain, Raymond de Thesan, prieur de Ferrals »61. Aucun de ces seigneurs n’est lié directement aux Hautpoul ou aux Montlaur. La Redorte, seigneurie de Jean de Nègre, n’est distante que d’une dizaine de kilomètres de Félines-Minervois. Ferrals est une abbaye dont les terres jouxtent celles de Cassagnoles, autre seigneurie des Hautpoul, tandis que Pouzolles se trouve non loin de Murles, terre principale du père de Jeanne de Monlaur. Comme nous pouvons le voir, ces connexions, sans lesquelles un noble n’est rien, sont discernables mais demandent à être précisées.

35Les procès de noblesse de l’Ordre de Malte permettent d’appréhender les différents groupes nobiliaires toulousains et ce qui les unit ou les divise. Deux parties sont aisément discernables : un groupe composé de nobles dont le statut, ancien ou non, a été obtenu de façon traditionnelle, par l’exercice des armes ou par la détention de droits seigneuriaux et de terres, peu nombreux numériquement, et un groupe issu directement de la ville et des fonctions qu’elle engendre. Dans cette population, nos sources permettent de voir l’élévation sociale des marchands pasteliers, anoblis par capitoulat, qui font faire des études de droit à leurs descendants afin qu’ils accèdent à des fonctions prestigieuses au sein du Parlement de Toulouse.

36Ce qui unit les nobles de ces groupes, « traditionnel » et « de robe », est tout d’abord un mode de vie, visible dans les citations d’actes notariés des procès. Ils se croisent au sein des arbres généalogiques des chevaliers de Malte, se fréquentent comme le montrent les pactes de mariages et les enquêtes de l’Ordre de St Jean, dans lesquels ils apparaissent comme témoins. quelle que soit l’origine de noblesse, ils pratiquent l’« ubiquité nobiliaire », dont nous avons relevé certains exemples. Au-delà de leurs différences, ils forment une noblesse composite.

37Cette identité nobiliaire apparaît aussi au travers des fonctions exercées par les ancêtres des chevaliers. Ils sont des seigneurs et, qu’en tant que tels, ils administrent des terres. Ils peuvent aussi exercer une profession ou un office à la Cour. Les actes mentionnant ces fonctions forment une partie non négligeable de notre corpus documentaire.

38Le dernier point commun important entre les groupes composants cette « noblesse composite » toulousaine est le désir de conserver son rang, au travers des stratégies matrimoniales et patrimoniales que nous avons relevées. L’hypergamie masculine et la désignation d’un héritier unique permettent à la fois de montrer le prestige de la lignée et de conserver sa fortune. Nous avons également souligné que la patrimonialisation des offices est précoce à Toulouse. Enfin, les cadets ne sont pas oubliés, qu’ils entrent au sein du prestigieux Ordre de St Jean de Jérusalem ou qu’ils se marient et fondent des branches collatérales.

39La mise en place de ces stratégies, qu’on retrouve dans toutes les familles des chevaliers étudiés, implique l’appartenance à des réseaux. Les lignages forment des toiles que nous pouvons deviner, comme nous l’avons montré avec l’exemple des chevaliers de Nupces, de Caulet et d’Aignan (document 1). Ces liens familiaux sont souvent doublés de liens professionnels. Enfin, faire entrer un fils ou une fille dans l’ordre de Malte demande d’abord aux familles de donner les noms de témoins fiables parmi la noblesse de la région. On peut se poser légitimement la question des rapports entre ces nobles et nous espérons que des recherches futures pourront y répondre.

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Notes

1  Charles Loyseau, Traité des Offices, cité par Philippe Hamon, « Les nobles et la ville : du jeu des possibles au possible advenu », dans Thierry Dutour (dir.), Les nobles et la ville dans l’espace francophone (xiie-xvie siècles), Paris, Presse universitaires Paris-Sorbonne, 2010, p. 207.

2  Voir Thierry Dutour (dir.), Les nobles et la ville dans l’espace francophone…, op. cit.

3  L’expression est de Philippe Contamine (Philippe Contamine (dir.), L’État et les aristocraties xiie-xviiie siècle. France, Angleterre, Écosse, Paris, Presses de l’École Normale Supérieure, 1989, Introduction).

4  Ellery Schalk, L’épée et le sang : une histoire du concept de noblesse (vers 1500-vers 1600), Seyssel, Champ Vallon, coll. « Époques », 1996, et la critique très intéressante qu’en fait Michel Nassiet dans « Pedigree AND valor. Le problème de la représentation de la noblesse en France au xvie siècle », dans Josette Pontet, Michel Figeac et Marie Boisson (dir.), La noblesse de la fin du xvie siècle au début du xxe siècle, un modèle social ?, tome 1, Biarritz, Atlantica, 2002, p. 251-269.

5  Robert Descimon, « Sites coutumiers et mots incertains : la formation de la noblesse française à la charnière du Moyen Âge et des Temps modernes », dans Thierry Dutour (dir.), Les nobles et la ville dans l’espace francophone…, op. cit., p. 341-357.

6  À l’exception notable du travail de Robert Forster, The Nobility of Toulouse in the 18th century : a social and economic study, Baltimore, The Johns Hopkins Press, 1960.

7  Antoine du Bourg, Histoire du Grand Prieuré de Toulouse et des diverses possessions de l’Ordre de Saint Jean de Jérusalem dans le Sud-Ouest de la France… avec les pièces justificatives et les catalogues des commandeurs/ par M. A Du Bourg, Ordre de Malte, Toulouse, L. Sistac et J. Boubée, 1883.

8  Anne Brogini et Germain Butaud, « Prouver sa noblesse de nom et d’armes. Fonctionnement et enjeux des procès provençaux de l’Ordre de Malte (xve-xviiie s.) », Cahiers de la Méditerranée, no 97/2, Anne Brogini, Germain Butaud, María Ghazali et Jean-Pierre Pantalacci (coord.), Nobles et chevaliers en Europe et en Méditerranée, décembre 2018, p. 47-72.

9  Archives of the Order of Malta [AOM] 3636B, f. 11v, procès de Jean Baptiste Louis de Chalvet de Rochemonteix, 1766.

10  Cette illustre famille chevaleresque a laissé un fonds privé aux Archives départementales de Haute Garonne (série 3J). Ils m’ont particulièrement intéressée car ils entrent dans les preuves d’au moins trois des chevaliers de mon échantillon, le chevalier Clément François de Pins, reçu en 1714 (AOM 3607E), Pierre Paul de Rochechouart, reçu en 1715 (AOM 3608B) et Joseph de Hautpoul, reçu en 1716 (AOM 3608A).

11  Archives Départementales de Haute-Garonne [ADHG], G 37 J3, Fonds Privé Buisson d’Aussone, procès de Mathieu de Buisson d’Aussone, 1615.

12  C’est le roi Henri II qui officialise cette noblesse en 1552 : « tous et chacun les capitouls qui ont été et serons dudit Toulouse usent en jouissance de tous tels et semblables prérogatives, prééminences, franchises et libertés, comme font les autres nobles de notre Royaume » (Jean-Paul Buffelan, La noblesse des capitouls de Toulouse, Saint-Gaudens, L’Adret, 1986, p. 57).

13  Arlette Jouanna, « Perception et appréciation de l’anoblissement dans la France du xvie siècle et du début du xviie siècle », dans L’anoblissement en France, xve-xviiie siècles : Théories et réalités, Pessac, Centre de Recherches sur les Origines de l’Europe Moderne, Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine, 1985, p. 1-36.

14  ADHG, 37 J3, Fonds privé Buisson d’Aussone, f. 15r, procès de Mathieu de Buisson d’Aussone, 1615. Les Annales de l’Hôtel de Ville mentionnent « Hugues, autre Hugues, Pierre, Jean, autre Jean, Martin et autre Jean de Buisson, seigneurs et barons de Mirabel, Lautreville, Bauveilhe, Monmaur et Aussone » comme ayant occupé des fonctions de capitouls douze fois entre 1444 et 1606.

15  Alexandre du Mège, Histoire des institutions religieuses, politiques, judiciaires et littéraires de la ville de Toulouse, Toulouse, La Chapelle, 1844, p. 162 et 174.

16  Ceci n’est pas mentionné dans le procès de noblesse de son arrière-petit-fils, pour des raisons évidentes.

17  Jean-Marie Constant, « La noblesse “de ville” au xvie siècle. Deux modèles provinciaux : l’Orléanais et le Maine », dans Thierry Dutour (dir.), Les nobles et la ville dans l’espace francophone…, op. cit., p. 327-339.

18  Anne-Marie Cocula, « Formation et affirmation d’un patriciat : le Parlement de Bordeaux au xviie siècle », dans Claude Petitfrère (dir.), Construction, reproduction et représentation des patriciats urbains de l’Antiquité au xxe siècle, Tours, Presses universitaires François-Rabelais, 2013, nouvelle édition [en ligne], p. 283-296.

19  AOM 3634A, f. 38r., procès de Jean François Pascal Henry Du Bourg, 1747.

20  François Bordes, « Rites et pratiques cérémonielles à Toulouse au Bas Moyen Âge et à la Renaissance », Mémoires de la Société Archéologique du Midi de la France, t. 65, 2005, p. 115-138 et p. 125.

21  Martin Wrede, « De la haute noblesse à la semi-noblesse. Forme d’existence nobiliaire en Europe au xviiie siècle », dans Nicolas Le Roux et Martin Wrede (dir.), Noblesse oblige. Identités et engagements aristocratiques à l’époque moderne, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2017, p. 47-68 et p. 51.

22  AOM 3609K, f. 15r., procès de François de Nupces, 1723, provision pour la charge de gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi de Jacob de Souilhac, arrière-grand-père du jeune présenté.

23  Roger Baury, « L’ubiquité nobiliaire aux xviie et xviiie siècle », dans Josette Pontet, Michel Figeac et Marie Boisson (dir.), La noblesse de la fin du xvie siècle au début du xxe siècle…, op. cit., t. 1, p. 133-155.

24  AOM 3620J, f. 9v, procès d’Anne d’Aignan d’Orbessan, 1738.

25  Jean-Claude Paulhet, « Les parlementaires toulousains à la fin du xviie siècle », Annales du Midi : revue archéologique, historique et philologique de la France méridionale, tome 76, no 67, 1964, p. 189-204.

26  AOM 3634A, f. 13v., procès de Jean François Pascal Henry Du Bourg, 1759.

27  Comme le font remarquer Anne Brogini et Germain Butaud, si les familles des témoins n’étaient pas alliées au moment de l’enquête, elles pouvaient fort bien l’avoir été dans le passé (voir Anne Brogini et Germain Butaud, « Prouver sa noblesse de nom et d’armes… », art. cit., p. 47-62).

28  ADHG, H 204-12, procès de Jean de Lagorrée, 1555, non folioté.

29  Louis de La Roques, Catalogue des Chevaliers de Malte, appelés successivement Chevaliers de l’Ordre Militaire et Hospitalier de St Jean de Jérusalem, de Rhodes et de Malte 1099-1890, Paris, Alp Desaide, 1891, t. 1, colonne 24 (trois chevaliers de Benque, mais un seul avant notre période) et colonne 205 (six chevaliers de Rigaud dont un avant notre période).

30  Bertrand d’Ysalguier fut élu en 1530 et Jacques de Lagorrée en 1542 (voir Alexandre du Mège, Histoire des institutions…, op. cit., p. 234 et p. 250).

31  Le procès du chevalier de Lagorrée (ADHG H 204-12, procès de Jean de Lagorrée, 1555, non folioté) nous est parvenu car il fut demandé par un de ses descendants en 1663. Ce Monsieur de Lagorrée, ancien capitoul, essayait-il de prouver l’ancienneté de sa noblesse ? Ce n’est pas mentionné.

32  ADHG, 37 J 3, Fond Privé Buisson d’Aussone, f. 11v-15r, procès de Mathieu de Buisson d’Aussone, 1615.

33  AOM 3608B, f. 4v., procès de Pierre Paul de Rochechouart de Clermont, 1715.

34  Sébastien Jahan, « Parenté et stratification sociale. Les témoins aux contrats de mariages dans la France du Centre Ouest, xviie-xviiie siècles », dans François-Joseph Ruggiu, Scarlett Beauvalet et Vincent Gourdon, Liens sociaux et actes notariés dans le monde urbain en France et en Europe, Paris, Presses de l’Université Paris-Sorbonne, 2004, p. 187-201.

35  ADHG, H 204-13, 4e cahier, f. 52v, procès de André de Lamamye, 1662.

36  Jean-Marie Constant, « Les structures sociales et mentales de l’anoblissement : analyse comparative d’études récentes, xvie-xviie siècles », dans Jean-Marie Constant, La noblesse en liberté, xvie-xviie s., Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2004, p. 43-56.

37  ADHG, H 204-13, 4e cahier, procès de André de Lamamye, 1662, f. 48r, union Lamamye/Forest Carlinéas, 1638, f. 50r, Lamamye/Assézat, 1577, f. 50v, Lamamye/Du Faur de Pibrac, 1549, f. 53r, Forest/Tournoir, 1578, f. 52v, Forest/Sauvin, 1614.

38  ADHG, H 204-13, 3e cahier, procès de Claude Jacques de Lamamye de Clayrac, 1737, f. 41v, union Clayrac/Lantilhau, 1624, f. 42v, Clayrac/Loupiac 1590, f. 42v, Clayrac/Sorbie de Teyrac, 1575, f. 44r, Clayrac/Tonnac, 1536.

39  Jérôme Luther Viret, Le Sol et le Sang, La famille et la reproduction sociale en France du Moyen Âge au xixe siècle, Paris, CNRS éditions, 2014, p. 144.

40  AOM 3634A, f. 13v, procès de Jean François Pascal Henry Du Bourg, 1759.

41  Ibid, f. 14r, testament de Étienne Du Bourg, 1551.

42  Michel Nassiet, La violence, une histoire sociale (France, xvie-xviiie siècles), Seyssel, Champ Vallon, Coll. « Époques », 2011, p. 192.

43  ADHG, H 203-19, procès de Jacques Du Faur de Pibrac, 1627, non folioté.

44  AOM 3634A, f. 75r., procès de Jean François Pascal Henry Du Bourg, 1759.

45  Firmin Laferrière, Essai sur les anciennes coutumes de Toulouse, Toulouse, Bonnal et Gibrac, 1855.

46  Michel Taillefer, Vivre à Toulouse sous l’Ancien Régime, Paris, Perrin, 2000, p. 281.

47  AOM 3608B, f. 3v., procès de Pierre Paul de Rochechouart de Clermont, 1715.

48  Jonathan Powis, « Aristocraties et bureaucraties dans la France du xvie siècle : État, office et patrimoine », dans Philippe Contamine (dir.), L’État et les aristocraties, xiie-xviiie siècle. France, Angleterre, Écosse, Paris, Presses de l’École Normale Supérieure, 1989, p. 231-246.

49  La Paulette était un droit annuel payé par les détenteurs d’un office pour pouvoir transmettre leur charge à une personne de leur choix. Mise en place en 1604 pour renflouer les caisses de l’État, elle officialisa de fait la patrimonialisation des offices.

50  AOM 3609K, ff. 7r.-7v., procès de François de Nupces, 1721.

51  AOM 3634A, f. 13r., procès de Jean François Pascal Henry Du Bourg, 1759.

52  Michel Nassiet, La violence, une histoire sociale, op. cit., p. 361-363.

53  Louis de La Roques, Catalogue des Chevaliers de Malte…, op. cit., colonne 181.

54  Jean-Bertrand de Luppé de Garrané, Mémoires et caravanes de Jean-Bertrand de Luppé de Garrané suivis des Mémoires de son neveu, Jean-Bertrand de Larrocan d’Aiguebère, Paris, Auguste Aubry, 1865, p. 19.

55  Anne Brogini et Germain Butaud, « Prouver sa noblesse de nom et d’armes… », art. cit., p. 47-62.

56  Guy Saupin, « Les oligarchies municipales en France sous l’Ancien Régime : réflexions méthodologiques sur l’analyse historique de leur reproduction à partir de l’exemple de Nantes », dans Claude Petitfrère (dir.), Construction, reproduction et représentation des patriciats urbains…, op. cit., p. 95-112.

57  Sylvie Mouysset, « Stratégies lignagères du corps de ville de Rodez aux xvie et xviie siècles », dans Claude Petitfrère (dir.), Construction, reproduction et représentation des patriciats urbains…, op. cit., p. 113-122.

58  AOM 3603B, f. 3r., procès de Joseph Jacques de Caulet, 1704 ; AOM 3609K, f. 10r., procès de François de Nupces, 1723 ; AOM 3620J, f. 11v., procès d’Anne d’Aignan d’Orbessan, 1738, contrat de mariage de Jean Georges de Caulet et de Jeanne Desplats, 1635.

59  Michel Nassiet, La violence, une histoire sociale…, op. cit., p. 361-363.

60  AOM 3613, f. 5v., procès de Marc Antoine de Catelan, 1726.

61  AOM 3608A, f. 5r., procès de Joseph de Hautpoul, 1716.

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Table des illustrations

Titre Doc. 1. Le réseau familial entre les lignées des chevaliers de Caulet, Nupces et Aignan au xviie siècle
URL http://journals.openedition.org/cdlm/docannexe/image/15630/img-1.png
Fichier image/png, 47k
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Pour citer cet article

Référence papier

Laure Bagneris, « La noblesse urbaine à travers les procès de l’ordre de Malte. L’exemple du second ordre toulousain (xvie-xviie siècles) »Cahiers de la Méditerranée, 104 | 2022, 93-107.

Référence électronique

Laure Bagneris, « La noblesse urbaine à travers les procès de l’ordre de Malte. L’exemple du second ordre toulousain (xvie-xviie siècles) »Cahiers de la Méditerranée [En ligne], 104 | 2022, mis en ligne le 15 décembre 2022, consulté le 14 mai 2024. URL : http://journals.openedition.org/cdlm/15630 ; DOI : https://doi.org/10.4000/cdlm.15630

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Auteur

Laure Bagneris

Laure Bagneris est doctorante en histoire moderne au CMMC (Université Côte d’Azur). Après une maîtrise sur l’histoire curiale durant les guerres de religion, elle est devenue professeure d’histoire-géographie dans l’enseignement secondaire. Aujourd’hui, sa thématique de recherches cible l’ordre de Malte durant la première modernité. À travers l’étude des familles des dames et chevaliers hospitaliers, elle s’intéresse plus précisément à l’évolution du recrutement de cet Ordre chevaleresque nobiliaire et à l’histoire des élites en milieu urbain, ses réseaux et ses stratégies dans le Sud-Ouest de la France du xvie au milieu du xviie siècle.

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Droits d’auteur

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Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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