Depuis une dizaine d’années, les fonctionnalités numériques proposant aux utilisateur·ices de redécouvrir leurs « souvenirs » se sont multipliées. La présentation de photos prises le même jour les années précédentes et les rétrospectives sont désormais monnaie courante. Les souvenirs numériques constituent également une manière originale de réinterpréter les données pour les faire « revenir » dans l’actualité des utilisateur·ices : non pas comme recommandations en vue d’une action future, mais comme un passé digne d’être rappelé à la mémoire. À partir d’entretiens menés auprès de professionnel·les ayant développé des fonctionnalités de souvenirs numériques au sein de six entreprises (Facebook, Google et Dropbox ainsi que Timehop, Memoir et Day One), l’article interroge la manière dont se construisent les définitions du « bon souvenir » et les différents « assemblages de données » (Kitchin et Lauriault, 2014) auxquelles elles renvoient. L’attention portée au travail des professionnel·les permet de rendre compte des normes sociales, des contraintes économiques et techniques ainsi que des visées commerciales qui sous-tendent ce qui s’apparente, en fin de compte, à la construction des cadres par lesquels nous faisons en ligne l’expérience de la réminiscence.