L'Égypte ou la Grèce : controverses esthétiques sur l'origine à la fin du XVIIIe siècle
Résumé
Au sortir des Lumières, les théories sur l’art égyptien oscillent dans les cercles intellectuels français et germaniques entre l’intérêt pour une civilisation décrite par les Grecs eux-mêmes comme leur plus grande influence et le rejet d’une culture tantôt accusée de fétichisme, tantôt simplement ramenée à un rang d’infériorité imputée à son appartenance orientale – et africaine. Jusqu’au déchiffrement des hiéroglyphes par Champollion, en 1822, l’Égypte antique est saisie via des formes encore quasiment muettes, qui laissent libre cours aux hypothèses et soupçons les plus contradictoires. Il est ainsi frappant de constater à quel point, dans un geste d’encouragement mutuel, les considérations techniques sur l’art pharaonique servent de justifications à la démonstration du statut philosophique équivoque de l’Égypte – et, inversement, comment ce qui est connu de la pensée des Anciens Égyptiens est employé comme explication des particularités techniques de leurs œuvres.
Cette communication visera à montrer l’entrelacement des analyses de l’esthétique, de la technique et de la philosophie qui caractérise la réception de l’art égyptien entre la fin du XVIIIe siècle et le début du XIXe siècle. En partant des tensions cristallisées durant cette période sur la question égyptienne chez Winckelmann, Quatremère de Quincy et Hegel, j’examinerai les effets ressentis sur son appréciation esthétique par la philosophie occidentale.