Dans le cadre du PCR Neriomagus/Aquae Nerii, une recherche a été engagée en 2011 sur le thème de l'alimentation en eau potable de la ville de Néris-les-Bains (Allier) à l'époque romaine. L"opération, coordonnée par Carlotta Franceschelli (MCF en Histoire et Archéologie du monde romain à l'Université Blaise-Pascal de Clermont-Ferrand), a pu compter, dès le début, sur la collaboration stable d'une équipe d'archéologues, topographes et géophysiciens de l'Université de Bologne (Italie), coordonnée par Pier Luigi Dall'Aglio (Professeur de Topographie Antique à l'Université de Bologne). La question de l'alimentation en eau de la ville de Néris-les-Bains à l'époque romaine suscite, depuis toujours, l'intérêt des érudits locaux et des passionnés d'antiquités, qui ont reconnu, à partir de la deuxième moitié du XIXe s., l'existence de deux aqueducs, appelés des Combes et des Viviers. Le premier prenait ses sources principales dans le bois de Tigoulet (commune de Durdat-Larequille, Allier) et arrivait à Néris-les-Bains après un parcours d'environ 10 km, qui le portait à franchir un dénivelé d'environ 100 m. Le second avait son origine au bois du Quartier (commune du Quartier, Puy-de-Dôme) et, après un parcours d'environ 35 km, arrivait à franchir le dénivelé considérable d'environ 250 m. L'étude de la documentation ancienne a toutefois montré que ces structures étaient, de nos jours, loin d'être bien connues, notamment pour ce qui était de leur tracé précis, de leur fonctionnement ainsi que de leur chronologie. Les activités des deux premières années d'opération (2011-2012) se sont donc concentrées sur ces deux aqueducs, dont la visibilité est actuellement très modeste, à cause d'un conduit presque complétement réalisé en conduite souterraine et de l'absence de traces avérées de regards de visite. Après une première campagne de prospections en 2011, les activités de 2012 ont mis en œuvre une approche multidisciplinaire, associant activité de prospection et sondages de fouille. Les prospections se sont déroulées en deux temps, avec une première phase de prospections pédestres, suivie par une activité de prospections géophysiques, géomagnétique et géoradar. Elles ont concerné, de manière systématique, les territoires des communes de Néris-les-Bains (en 2011), Ronnet (en 2011), Durdat-Larequille (en 2012), Néris-les Bains (en 2013) et Arpheuilles-St-Priest (2013). L'ensemble des résultats des prospections a été georéférencé par le moyen d'un GPS différentiel. Au terme de la troisième année d'activité, la prospection géophysique, conduite dans les secteurs préalablement circonscrits par le moyen de la prospection pédestre et de l'enquête orale, a permis de reconstituer le tracé des aqueducs des Combes et des Viviers sur une longueur respective d'environ 3000 et 13500 m linéaires. Les activités de 2013 ont principalement porté sur la question de l'arrivée de l'aqueduc en ville, dans le secteur compris entre les Villattes - où nous avons réalisé un sondage de fouille dans les années 2012-2103 - et le Péchin, où l'existence d'un grand réservoir était signalée par les auteurs du XIXe s. C'est principalement L. Esmonnot (1885) qui nous a restitué un plan de détail de cette structure, avec sa localisation approximative dans le secteur du Péchin. Il la décrit comme un « grand réservoir ayant la forme d'un trapèze de 15-20 mètres de base, terminé par une partie demi-circulaire de 13.00 de rayon » et l'interprète comme un édifice destiné à « l'épuration des eaux ». C'est ainsi qu'en 2013 nous avons effectué une série de prospections géophysiques dans le secteur compris entre les Villattes et le Péchin. Nous avons ainsi constaté que le conduit de l'aqueduc traverse longitudinalement le plateau du Péchin, surélevé d'environ 30 m sur le vallon central, qui abrite la ville antique, jusqu'à atteindre l'extrémité septentrionale de ce plateau, qui constitue l'endroit idéal pour organiser la distribution de l'eau en ville. C'est à cet endroit que, toujours en 2013, nous avons réalisé un sondage, dans la parcelle située au 2 bis de rue Kléber, susceptible de renfermer une partie des structurés observées au XIXe s. Les résultats de ce sondage se sont révélés du plus grand intérêt, avec la mise au jour d'une partie de la grande structure indiquée par Esmonnot et traditionnellement interprété comme le château d'eau de la ville antique. Il s'agit d'une structure de forme subcirculaire (sans pouvoir exclure pour le moment une forme en U), constituée par un double parement de moellons de pierre, avec nucleus interne en opus caementicium. Le mur a une épaisseur global d' 1,75 men moyenne et atteint les 2 m sur son côté ouest. Il est lié avec un deuxième mur, réalisé avec la même technique de construction, pour une largeur d'environ 0,85 m, qui a été reconnu sur une longueur d'environ 10 m, en direction ouest. Ce deuxième mur est traversé par un conduit vouté, dirigé vers nord-est/sud-ouest. Sa voute est réalisée en opus caementicium, avec moellons de pierre de dimensions moyennes noyés dans un mortier de chaux de couleur gris/blanchâtre, très résistant. Ce conduit a été observé sur une longueur de 1,88 m et il présente une largeur comprise entre 1,60 m (côté nord-est) et 1,30 m (côté sud-ouest). Pour ce qui est de la fonction de cette structure, sa position topographique (sur un haut géomorphologique, à l'arrivée de la branche principale de l'aqueduc) et stratigraphique (structure en grande partie souterraine), ses dimensions, l'épaisseur de ses murs, ainsi que sa technique de construction rendent raisonnable son interprétation comme un castellum lié à la distribution de l'eau en ville. L'hypothèse devra toutefois être vérifiée par un approfondissement des recherches. Pour ce qui est de sa chronologie, le mobilier collecté dans le cadre de cette opération, actuellement en cours d'étude, semble se situer dans le courant du Ier s. ap. J.-C. Une définition chronologique définitive pourra être proposée seulement au terme de cet étude.