Alors que le deuxième congrès des CIAM se tient à Frankfort-sur-Main et qu'un certain nombre de ses acteurs ont rejoint l'URSS ou s'apprêtent à le faire, un vif débat portant sur la ville socialiste oppose les économistes, sociologues, urbanistes et architectes soviétiques. Ce débat, qui prône l'émergence de nouvelles formes d'habiter et une répartition territoriale égalitaire des fonctions urbaines, sera de courte durée. Le changement de directives qui s'opère dès 1930 clôt non seulement le débat mais freine les intenses recherches menées sur ces sujets depuis le milieu des années 1920 et qui se sont notamment traduites par l'émergence des domy-kommouny (maisons-communes), projets dont les nombreuses variantes seront développées sous la direction de Moisseï Guinzbourg au sein du Stroïkom et publiées dans la revue SA (Architecture contemporaine). Jusqu'aux années 1960, la question de l'habitat économique va être évacuée au profit du retour de l'appartement individuel et mono-familial aux surfaces généreuses. Ce modèle d'appartement est dessiné alors qu'une violente crise de logement sévit dans les grandes villes faisant porter à 5m2 la surface moyenne de logement par habitant à Moscou. Mais le dessin n'est pas réalité et ces appartements, tout comme l'ensemble du parc, seront en grande partie divisés en habitat communautaire, le large couloir facilitant ces transformations. Alors que la fameuse cellule F, appartement en duplex de 27 m2, élaborée par l'équipe de Guinzbourg et appliquée dans l'immeuble qu'il a réalisé entre 1928-32 avec Ignatiï Milinis pour les employés de Narkomfin, offrait à la fois la possibilité de bénéficier des services communs et celle de vivre en autonomie du collectif avec ses cuisine et salle de bain individuels, les kommounalki, telles qu'elle sont été vécues par 90% de la population urbaine jusqu'à la fin du régime soviétique, n'offraient en partage que le couloir, la salle de bain et la cuisine. En revisitant ces modèles pensés et réalités vécues et en les confrontant aux projets contemporains d'habitat partagé (tels ceux réalisés par Kraftwerk), il s'agira d'interroger la nature et l'évolution des espaces que l'on est prêt à mettre en commun et du minimum habitable.