L’ouverture du canzoniere labéen par le récit mythique du don de la lyre de Sapho par Apollon possède un enjeu considérable. Elle n’engage pas seulement la revendication du modèle de Sapho mais également un programme poétique complexe qui vise à négocier la consécration d’une voix poétique singulière par sa qualité féminine. Cette couleur féminine, qui trouve son expression dans la matière métrique, mélodique et rythmique du vers, se caractérise par une tension oxymorique en ce qu’elle unit dans une discordante harmonie accords lyriques et plainte élégiaque. Parce que cette qualité esthétique est intrinsèquement liée à la construction d’une énonciation féminine, sonnets et élégies se distinguent par leur porosité générique, échangeant leurs matières, leurs thèmes, leurs intertextes, leurs rythmes, leurs mélodies.