La codification de l’interdiction de la dénaturation des actes (C. civ., art. 1192) interroge le juriste quant au sens de la règle, sa force, son domaine et sa portée. Une analyse chiffrée des décisions rendues en 2022 par les chambres civiles de la Cour de cassation révèle que près d’un arrêt de cassation sur vingt l’a été au visa du principe selon lequel le juge du fond a l’obligation de ne pas dénaturer les écrits qui lui sont soumis. Le contrôle de la dénaturation judiciaire a été initié en 1872 ; un principe a été formulé en 1986. L’ensemble des arrêts rendus à son visa est ici analysé sous un angle quantitatif et qualitatif. Loin d’être anecdotique comme il est parfois présenté, le contrôle de dénaturation opéré depuis 150 ans est devenu considérable et symptomatique de l’évolution latente de la Cour suprême de l’ordre judiciaire.