Qu’apprend-on en suivant la circulation des énoncés de droit dans les couloirs des administrations qui appliquent automatiquement de larges corpus de règles aux situations personnelles de millions d’administrés ? La communication propose d’attirer l’attention de la sociologie du droit vers un type méconnu de circulation : la traduction des énoncés juridiques vers des programmes exécutant automatiquement et massivement des actes administratifs, comme le calcul de la paie, des prestations sociales ou encore de la fiscalité. À partir du cas des aides personnelles au logement, mon propos est, d’une part, de mettre en lumière l’épaisseur cognitive et matérielle des tâches exécutées par les agents administratifs qui œuvrent à la traduction du droit en code informatique et ainsi de leur faire une place parmi les professionnels de l’écriture et de la lecture du droit. D’autre part, je montre que la traduction informatique du droit n’est en aucun cas techniquement neutre, mais correspond à une « altération », dont il s’agira d’expliquer les enjeux techniques et politiques, caractéristiques de la circulation du droit, du législateur vers un agencement calculatoire, à destination des allocataires. La communication s’appuie sur un terrain inhabituel en sociologie du droit : l’observation d’une réplication en laboratoire du calcul des droits du logement et des échanges avec les rédacteurs des textes sur l’interprétation de dispositions. Elle s’appuie sur un cadre théorique inspiré de l’ethnométhodologie et visant à mettre en lumière les passes du droit dans l’administration.