Ce chapitre interroge la manière dont les institutions scolaires façonnent les visions adolescentes du monde social. Pour ce faire, il repose sur la comparaison de deux établissements scolaires : un lycée bourgeois de l’Ouest parisien et un dispositif d’ouverture sociale dans une métropole du sud de la France. À partir de cette mise en regard, nous montrons que les réputations territoriales structurent fortement les partitions du monde social inculquées dans le cadre scolaire. Les modèles de réussite sociale véhiculés dans ces deux établissements apparaissent ici fortement liés à l’espace local : c’est toujours en référence à la fraction majoritaire du groupe social présent sur le territoire, comme à des représentations stéréotypées de ces populations et du territoire que ces modèles sont construits. À ce titre, la comparaison de deux contextes scolaires aussi différents permet de montrer à quel point ce que travaille l’école varie selon les établissements, leur territoire d'implantation et leur peuplement. Ce faisant, ce chapitre témoigne de l’importance qu’il y a à réencastrer l’analyse de la socialisation par les institutions scolaires dans le territoire et l’espace des formations dans lesquels les établissements scolaires sont insérés. Au-delà des (di)visions du monde social véhiculées dans ces établissements, ce chapitre s’intéresse également aux conditions de possibilité de l’adhésion des élèves à ces schèmes de classement. Il montre à ce titre à quel point les partitions du monde social proposées par l’institution scolaire emporte l’adhésion lorsqu’elle destine à une position que l’élève juge désirable du fait de dispositions préexistantes. Dans bien des cas cependant, cette adhésion demeure partielle, voire temporaire, appelant à interroger les limites, notamment temporelles, des potentialités socialisatrices d’un « contexte scolaire ».