La révolution industrielle du XIXe siècle marque un bouleversement majeur dans les modes de fabrication de la ville. La division du travail, la spécialisation des tâches et la massification de la production ont notamment engendré de profonds changements dans les rapports entre experts et habitants, déplaçant la « participation » en architecture au rang de pratique alternative. En effet, si l’implication des habitants dans la fabrication de la ville est aujourd’hui une pratique marginale, la participation était jusqu’alors, la norme 1 . Intrinsèquement liée aux urgences contemporaines, la participation en architecture a pourtant déjà contribué de manière quantitative et/ou qualitative à la résolution de crises urbaines, notamment au XXe  siècle. L’exemple des coopératives d’autoconstruction des Castors est l’un des plus édifiants : face à l’attentisme des pouvoirs publics en matière de production de logements, des familles ouvrières s’organisent pour construire elles-mêmes des cités entières. En 1954, 14 % de la production nationale de logements sociaux est réalisée par des Castors 2 , qui produisent des logements « de luxe » pour l’époque (avec chauffage central et tout-à-l’égout), influencent la législation en matière d’autoconstruction (création de la loi sur l’apport-travail en 1951), et remettent au goût du jour certaines techniques constructives jusqu’alors dévalorisées (usage de la clavette et du mâchefer). Naissant souvent « en résistance » vis-à-vis des modèles de production dominants, les expériences participatives ont néanmoins influencé les logiques institutionnelles de fabrication de la ville à de nombreuses reprises. C’est pourquoi il semble donc intéressant d’interroger l’apport de la participation face aux crises urbaines actuelles. Les déperditions d’énergies liées au vieillissement du bâti existant sont en effet particulièrement préoccupantes, notamment dans le domaine du logement, qui représente une part importante de la consommation énergétique nationale, et qui vous une part grandissante d’habitants à la précarité énergétique. Malgré les directives étatiques, seules 300 000 rénovations de logements sociaux sont réalisées chaque année (contre les 500 000 attendues), et 75 % des travaux effectués dans les maisons individuelles n’ont pas d’impact important sur la consommation énergétique. L’objectif « zéro carbone » à l’horizon 2050 paraît donc pour l’instant encore loin de nous. Dans ce contexte de crise environnementale, comment les démarches participatives en architecture pourraient-elles contribuer à la lutte contre la précarité énergétique de la rénovation énergétique en France ? La distinction préalable des démarches participatives et des pratiques collaboratives permet d’exclure de cette recherche un certain nombre de pratiques inefficaces. Nous nous intéressons ainsi au dispositif de permanence architecturale, qui semble particulièrement adapté aux enjeux de la rénovation énergétique du logement, bien différents des enjeux de la construction neuve. Cette étude se fonde notamment sur une expérimentation concrète de permanence (en cours au moment de la rédaction de cet article) réalisée dans le cadre de notre thèse, au sein de la cité d’Orient à Harnes, dans le Bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais.