Proust a prétendu avoir écrit "sans brouillon" l'article fondamental du "Figaro", "Sentiments filiaux d'un parricide", qui marqua au début de 1907 son retour à l'écriture après la longue retraite qui suivit le deuil de sa mère. En réalité, il existe un dossier génétique important pour cet article: les manuscrits (brouillons et première mise au net) de trois collections particulières qui se complètent sont ici rassemblés, transcrits et commentés, et font notamment apparaître les hésitations de Proust quant à la présentation de sa correspondance avec le parricide Henri van Blarenberghe quelques jours avant le drame. On lit ensuite le brouillon du long envoi (ou dédicace) de l'article à Daniel Halévy (1908), brouillon dont on ne connaissait jusqu'alors que la deuxième moitié et qui avait été confondu avec la lettre de condoléances de Proust à Daniel Halévy après la mort de son père Ludovic Halévy. Cet envoi prolonge l'article par une réflexion sur la culpabilité filiale à travers trois générations, de Proust à son grand-père Nathé Weil, en passant par sa mère, Jeanne Proust, et son adresse à Daniel Halévy quelques jours après la mort de son père n'est pas dépourvue d'ambiguïté.