Les sciences sociales adoptent intrinsèquement un regard critique sur les objets qu'elles étudient, parce que cette production de savoir - leur épistémologie - a précisément vocation à sonder la matière dont sont faits les mythes contemporains. Or, cette posture conduit bien souvent à désenchanter les mondes observés, y compris lorsque ces derniers sont vécus comme porteurs d'émancipation et d'espérance. Que d'inconfort, dès lors, pour qui aspire à allier analyse des sociétés et engagement dans celle-ci : que faire de la connaissance des limites, ambivalences voire contradictions de ces espaces pourtant conçus comme des "alternatives" ou des "utopies" ? A partir d'une recherche sur différentes formes de travail indépendant, je propose quelques pistes méthodologiques et épistémologiques : elles permettent d'une part d'identifier les vertus de plusieurs types de savoirs corrélatifs du regard critique, et porteurs d'espérance par la pensée. D'autre part, certains d'entre elles offrent des voies de passage vers l'action. Loin de se réduire à de simples outils techniques, les méthodes d'enquête et la relation du chercheur à son objet engagent un rapport épistémologique, éthique et politique à nos objets d'étude ; dans cette conception, cette intervention esquissera des manières de faire et d'écrire les sciences sociales à même d'ouvrir les possibles et de maintenir vivaces les espérances