Les faits susceptibles de véhiculer une image délétère de l’entreprise affichent une grande diversité. Premièrement, l’absence de définition juridique de l’entreprise, qui ne se réduit pas à la personne morale qui emploie le salarié, ni à la personne physique qui la représente, accroit le spectre des atteintes potentielles. En admettant que la mauvaise réputation s’apprécie en considération de l’opinion des tiers à la relation de travail, ces derniers peuvent être entendus très largement. Si l’on cible, à l’inverse, les entités décriées, la mauvaise réputation pourrait englober le discrédit touchant les actionnaires, les sous-traitants, les autres sociétés du groupe, les dirigeants sociaux, les partenaires commerciaux, voire les organismes de contrôle, de certification ou les agences de notation. Deuxièmement, si la matérialité de l’atteinte réside communément dans l’émission d’un avis personnel ou la diffusion d’une information ou d’un propos émanant d’autrui , elle peut aussi tenir à la médiatisation du comportement d’un salarié – parfois à son insu – absolument étranger à toute volonté d’exprimer une opinion, et encore moins une critique de l’employeur . Citons en ce sens l’exemple d’un trafic de stupéfiant rapporté par un journal et impliquant un individus identifié comme salarié d’une entreprise connue. Troisièmement, la dépréciation de l’entreprise peut relever d’actes volontaires ou non et qui se matérialisent aussi bien par des actions que par des omissions . Or, il n’est pas certain, ni même souhaitable, que le juge sanctionne de manière indifférenciée des comportements à ce point dissemblables, au seul motif qu’ils auraient pour dénominateur commun de nuire à la réputation de l’entreprise. Quatrièmement, les actes constitutifs d’une atteinte à l’image de l’entreprise peuvent avoir lieu dans le cadre de la vie professionnelle comme dans celui de la vie personnelle. Là encore, l’altérité des cadres spatio-temporel de l’examen doit être pris en compte au moment de reprocher au salarié un éventuel manquement. La lutte contre la mauvaise réputation est parfois source de conflit lorsqu’elle prend la forme d’une limitation des droits et libertés individuelles des salariés . Face à ce champ contentieux, potentiellement illimité, comment appréhender les atteintes à la réputation de l’entreprise causées par les salariés ? A cette question, le droit du travail répond par la mise en œuvre d’une logique de conciliation, entre la protection des droits et libertés des salariés, d’une part, et la prise en compte de l’intérêt de l’entreprise, d’autre part. La recherche de ce point d’équilibre se manifeste tant à travers une prise en compte différenciée des atteintes à la réputation de l’entreprise (I) que par des réponses diversifiées à ces atteintes (II).