DE LA REFORMULATION À LA COMPLÉMENTARITÉ : LE CAS DE SINON
Résumé
Le mot sinon connaît deux grands types d’emplois : devant une unité linguistique au sein d’une phrase, il introduit une ‘reformulation non paraphrastique’, avec des distributions spécifiques selon que la valeur argumentative est l’‘exception’, la ‘restriction’ ou la ‘disjonction’. En emploi absolu, sinon exprime une ‘hypothèse négative’ ou introduit une ‘digression’, emplois que l’on peut regrouper sous le terme de ‘complémentarité’.
Le but notre étude est de montrer que les deux derniers emplois de sinon fréquents à l’oral partagent certaines propriétés avec les trois premiers, davantage représentés à l’écrit. L’examen du type d’alternative que met en jeu l’emploi de sinon permet ce rapprochement. En effet, alors que les sinon exceptif et restrictif engagent une alternative exclusive, sinon disjonctif exprime une alternative disjonctive. De même, avec l’emploi d’hypothèse négative, l’alternative est soit exclusive soit disjonctive selon que sinon introduit une légitimation ou une conséquence négative par rapport à l’énoncé de référence.
Dans ses emplois de digression, sinon peut introduire une information alternative, exprimant une correction alors comparable à l’emploi disjonctif. Si en revanche il est suivi d’un énoncé exprimant une information essentielle, il entretient alors des affinités avec le sinon exceptif, sauf que l’orientation argumentative est inversée.
L’information complémentaire fournie dans le contexte droit des sinon d’hypothèse négative et de digression implique en fait la modification de l’état d’information du contexte gauche, au moyen d’opérations comparables à celles qui ont été décrites pour les connecteurs de reformulation non paraphrastiques tels que après tout (cf. Rossari, 2002) : soit l’état d’information du contexte gauche est supprimé et substitué par celui du contexte droit, soit il est légitimé par la mise à jour de l’état d’information du contexte droit.
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)