Quelle humanité reste-t-il lorsque hommes et femmes de lettres, mus par la profonde conviction de la mission de la littérature, sont eux et elles-mêmes confrontés aux limites de l’humain ? Lorsque « toute l’humanité » n’est plus que « matière », pour reprendre une formulation de Ford ? Cette question est centrale à mon ouvrage Writers at War, dans lequel je me suis intéressée aux représentations en prose de la guerre par deux autrices et deux auteurs ayant connu une expérience directe de la Première Guerre mondiale sur le Front occidental. Le corpus fut sélectionné afin de mêler les voix masculines de combattants et officiers et les voix féminines d’infirmières et de chroniqueuses ; et, pour chacun de ces auteurs et autrices, de comparer les textes écrits à proximité géographique et temporelle immédiate de la guerre, avec des textes de ces mêmes auteurs et autrices écrits à une distance de plusieurs années. Il s’est agi à la fois d’interroger les différentes manières dont ces écrivains et écrivaines ont tenté de représenter leur expérience de la guerre à partir de l’immédiateté temporelle et spatiale du Front, et d’étudier l’impact multiforme de la guerre sur le (re)développement de leur esthétique. Dans le cadre de ce séminaire de l’axe 1, je me suis concentrée sur la dimension de la matérialité de l’expérience de la guerre et sur les conséquences éthiques des choix de représentation de cette expérience, en laissant de côté les aspects plus techniques de représentation et d’esthétique.