Le "Cymbalum mundi", somme de quatre dialogues prétendument « poétiques, fort antiques, joyeux et facétieux », connut deux éditions très rapprochées, à Paris à Lyon, à la charnière de 1537 et 1538. François Ier en personne en sollicita l’examen dès qu’il en prit connaissance (début mars 1538) et la Sorbonne en recommanda bientôt la suppression au prétexte que le libelle était « pernicieux », de sorte qu’il n’en subsiste plus aujourd’hui que trois exemplaire, dont un seul de l’édition originale datée de 1537. De fait, il s’agissait de rien moins qu’une œuvre légère et facétieuse : le "Cymbalum mundi" véhiculait au contraire une téméraire et très fâcheuse « philosophie des Antipodes ». La référence aux Antipodes provient ici d’un passage-clé du quatrième dialogue, où des habitant des Antipodes inférieurs se plaignent d’être refoulés par leurs antagonistes supérieurs et menacent de les envahir ; mais elle dénote aussi l’exotisme de cette « philosophie » venue d’ailleurs, pour qui voudrait croire encore à son anachronisme. Pour cause, le "Cymbalum mundi" combinerait de manière cohérente antichristianisme, athéisme et contestation de l’ordre politico-social du monde supposément voulu par Dieu. Quelques pistes sont avancées pour expliquer comment l’auteur, indubitablement Bonaventure des Périers, qui termina sa vie (par un suicide ?) au service de Marguerite de Navarre, en vint à concevoir ces idées. Cependant une chose paraît assurée : il n’était certainement pas seul à penser de la sorte. La foi pour laquelle tant de gens se battent au XVIe siècle est d’autant plus précieuse, à leurs yeux, qu’elle a changé d’étalon cognitif et est devenue, de ce fait, une denrée plus rare.