L’usine tend à devenir de plus en plus connectée et robotisée, avec l’élan européen vers l’industrie du futur. L’usine 4.0 est le résultat d’une transformation de la vision de l’usine manufacturière traditionnelle. Prenant acte des mutations du numérique, elle se pense à l’heure de la réindustrialisation et se veut une clé de stratégie industrielle. Plus compétitive, plus innovante, plus écologique, et soucieuse de satisfaire tous les désirs des consommateurs finaux, elle n’est pas sans soulever de multiples questions juridiques. Son organisation est repensée au travers d’un changement de modèle économique de l’usine et de son impact environnemental à l’ère du numérique. En inventant une nouvelle façon de produire, elle impose de résoudre des problèmes qui sont souvent minorés ou négligés, à savoir l’interopérabilité des systèmes industriels et la cybersécurité de ce nouvel écosystème. L’usine du futur repose également sur le développement d’un réseau avec ses fournisseurs et ses clients, ce qui pourrait avoir pour effet de modifier leurs relations juridiques. De même, ce réseau pourrait rendre perméable les échanges de données, posant aussi la question de la propriété des données générées par l’usine connectée. Sur le plan environnemental, l’usine connectée bouleverse les schémas traditionnels en rompant avec le modèle classique de la destruction des ressources. Usine frugale par définition, elle pourrait accroître sa compétitivité, bien mieux qu’une usine classique, en relevant le défi environnemental par le biais d’un accroissement de son efficacité énergétique, mais également par un effort tendant à la réduction à la source de son impact environnemental par une gestion plus efficace de ses besoins énergétiques, de ses matières premières et de sa production de déchets. Sous le prisme social, les implications juridiques de l’usine connectée méritent d’être nuancées. L’usine connectée se veut comme un lieu garantissant la plus grande santé et sécurité de l’humain. En effet, d’une part, les produits mis en circulation deviennent totalement traçables. D’autre part, les salariés sont assurés d’être physiquement davantage protégés en raison de l’écosystème connecté. Toutefois, l’usine 2.0 peut être source de nouveaux risques sociaux que nous évaluons. Dans un tel lieu dédié à la production, l’humain pourrait ne plus y avoir sa place. Tout naturellement, la question de la disparition des emplois doit être posée. L’usine du futur pourrait entrainer la disparition des emplois, ou à tout le moins, porter atteinte à la relation de travail - problèmes auxquels le droit du travail n’est pas préparé -, et avoir pour effet d’engendrer une externalisation massive de la maintenance, des dépannages et des mises à jour, satellisant une cohorte de prestataires. A cela s’ajoutent les nombreux risques pesant sur les droits humains des salariés, qui pourraient concerner leur vie privée, leurs données à caractère personnel, voire leur intégrité corporelle ou leur dignité via les puces électroniques sous-cutanées.