Registres publics vs blockchain publique. L’État et le notariat face à la révolution blockchain
Résumé
Contrairement à ce que son nom pourrait laisser croire, la blockchain publique n’est aucunement rattachée à l’État. Le mode d’administration des registres qu’elle propose est totalement décentralisé et s’oppose au mode centralisé des registres publics tenus par les administrations d’État. Les enjeux de cette nouvelle voie d’administration décentralisée peuvent être mis en lumière en prenant appui sur un cas d’usage particulier, celui de la tenue par l’administration des registres du cadastre et de la publicité foncière dans lesquels les notaires, officiers publics délégataires de puissance publique, sont impliqués. En effet, si la profession notariale a elle-même été menacée par la blockchain, présentée à l’origine comme une technologie ayant vocation à remplacer le notaire, tiers de confiance institutionnel, ces craintes sont aujourd’hui écartées car il a été démontré que la blockchain ne peut remplir toutes les missions du notaire et la profession, loin d’être impressionnée par cette nouvelle technologie, s’en empare actuellement pour en faire un outil à usage des services notariaux qu’elle propose. Pour autant, la non-substituabilité de la blockchain aux notaires n’a pas été observée du point de vue de l’État : l’administration étatique pourrait-elle se passer des notaires pour alimenter ses registres publics ? À l’inverse, dans l’éventualité d’un remplacement de l’administration étatique par la blockchain, les notaires pourraient-ils participer au fonctionnement du « registre public » de la blockchain, tout comme ils participent actuellement à celui des registres publics étatiques ? En effet, dès lors que les registres publics pourraient être tenus par une blockchain publique, le notaire se trouverait confronté à un nouveau type d’administration auquel il serait susceptible de collaborer. La blockchain conduit alors à interroger la fonction étatique des registres publics, à laquelle les notaires sont associés, en démontrant qu’ils participent à la construction de l’État. Elle pourrait ainsi concourir à une éventuelle déconstruction de l’État dont les notaires pourraient, si l’on n’y prenait garde, être les premiers maillons.
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