A compter du Xe siècle, au lendemain des incursions vikings, de la fondation de la principauté normande (911) et de la restauration monastique qui l'accompagne, de nombreux sanctuaires se développent dans le diocèse de Rouen. Leur activité est soutenue par une intense production hagiographique, essentiellement composée de recueils de Miracula destinés à souligner l’efficacité des reliques conservées. Ces derniers nous renseignent sur le fonctionnement de centres de pèlerinage aux fortunes diverses, certains exerçant un rayonnement à l’échelle de la Chrétienté (Saint-Ouen de Rouen), d’autres faisant à l’inverse office de sanctuaire à rayonnement régional (Fécamp, Fontenelle) ou local (Duclair). Ces textes, par la richesse de leurs informations, donnent à voir des fidèles confrontés à des crises, individuelles ou collectives, et cherchant à les surmonter par le recours au sacré. Ils permettent de la sorte d’établir une typologie des motivations des pèlerins, d’étudier les rites pratiqués à travers la manipulation des reliques et par la médiation des moines desservant ces établissements religieux. Toutefois, il convient également de s’interroger sur les intentions d’écriture de ces hagiographes et de se demander si ces recueils de Miracula constituent le reflet exact de ces pratiques pèlerines ou s’ils ne cherchent pas au contraire à induire une certaine spécialisation des sanctuaires destinée à orienter les flux de croyants.