Compétences non académiques des élèves et jugement enseignant : quels effets sur l’orientation des élèves en fin de troisième ?
Résumé
Le développement de certaines compétences est favorisé par la mobilité de l’individu à l’intérieur d’un
mésosystème de sphères éducatives (André, 2012 ; Leroy, 2009). Pour Lahire (2002, 2004), ces compétences
apparaissent « dissonantes ». Au regard de l’orientation, il s’agit d’une prégnance de la sphère familiale
sur les choix des élèves (André, 2012). L’héritage du capital culturel, fait de cette sphère la première en
termes de construction de l’individu. Entre premières compétences et incorporation de nouvelles, de la «
réappropriation » à « l’accommodation » suivant les situations (Ibid. p.74-75), l’individu forge sa trajectoire
de vie. Ainsi, les choix d’orientation des individus ne proviennent pas du poids « obscur » de telle ou telle
structure (Boudon, 2004), mais davantage d’une rationalisation cognitive et axiologique opérée par
celui-ci lors du passage d’une sphère à une autre. En évoquant Bourdieu (1979) et Willis (1979), même
si elle s’érode, une culture de classe existe en filigrane. Une culture « contre l’école » est une façon de
construire du sens au regard de ce qu’ils vivent négativement dans la sphère scolaire. Notre propos sert
l’idée boudonienne que les relations élèves enseignants, tissées dans le cadre de l’école, exaltent des
rationalités que ledit cadre produit.
L’ensemble des compétences ne provient pas d’une seule sphère d’éducation et le terme usité peut varier
de « compétences sociales » (Fanchini et Morlaix, 2016) à « compétences transversales » (Tardif et Dubois,
2013), à « soft skills » (en opposition aux « hard skills ») (Coulet, 2011). Pour Millet et Thin (2005), une carrière
scolaire est unique, au carrefour d’une individuation (Simondon, 2005). Mais les enseignants font face à
un vide, un « chaînon manquant », entre le souhait républicain évaluatif et une pratique affrontant la réalité
(éléments qui font sens pour un enseignant et qui doivent être pris en compte dans l’évaluation). Les CNA
semblent combler ce vide. A la question « qu’est-ce que les CNA ? », nous répondons que le titre de Giret et
Morlaix (2016) explicite clairement ce qu’elles sont : sociales et non académiques. Sophie Morlaix (2018)
catégorise ces relations sociales en deux sous familles : intra individuelles (l’individu face à lui-même) et
inter individuelles (l’individu face à autrui). Prenant en compte le S4C, en distinguant les compétences
appartenant à ce champ (Fanchini, 2016) et celles non mesurables et non évaluables qui s’y retrouvent «
clandestinement », nous cherchons à connaitre les effets produits par les CNA, sur le jugement professoral
et sur l’orientation de l’élève en fin de troisième.
L’objectif de cette étude est de souligner l’importance de l’observation et d’entretiens même informels
dans une approche quantitative de collecte de données. Comment associer dans une même recherche,
paradigme positiviste (type processus-produits et médiateurs) et paradigme interprétatif.