Le Rimado de Palacio de Pero López de Ayala contient, dans toute sa partie finale (strophes 922-2122), une longue adaptation de l'histoire biblique de Job. Les sources utilisées par le poète dans cette versification nous sont maintenant bien connues (Livre de Job, Moralia de Grégoire le Grand) et les mécanismes d'écriture à l'oeuvre dans cette adaptation ont été ponctuellement – mais efficacement – étudiés par la critique. L'ensemble de ces études témoignent de l'obession du chancelier de Castille pour le thème jobien, sans qu'aient toutefois été mis en lumière les soubassements idéologiques et les partis pris esthétiques qui traversent cette section du recueil. Pourquoi le poète Ayala reprend-il une fois de plus le thème jobien ? Quelles inflexions personnelles donne-t-il à une histoire par ailleurs fortement ancrée dans la pensée médiévale ? Le présent travaille ne prétend pas donner de réponse exhaustive mais lance des propositions de réflexion sur le sens politique et sur la portée esthétique de la figure jobienne dans le Rimado de Palacio. La thèse ici défendue est double : il nous semble tout d'abord que l'auteur adopte dans cette récupération de l'histoire biblique un point de vue certes centré autour de la morale mais aussi autour de la politique ; et que cette versification peut être lue en divers endroits comme une déclaration d'intention de la part d'un auteur fier de sa production poétique.