L’engouement pour les séries policières depuis leur création dans les années 50 ne se dément pas. Une telle vitalité ne va pas sans paradoxes : né de la modernité, le récit policier en fait le portrait cauchemardesque. Tandis que l’idéologie du progrès triomphe, il s’inquiète du désordre et de la violence qu’elle génère. On est loin néanmoins d’un genre anxiogène. Car la promesse à l’horizon du récit policier, c’est celle du rétablissement de l’ordre. La catharsis est son mode de fonctionnement programmatique. Avec le récit policier se joue le drame libératoire de l’expurgation des passions, un drame rassurant renouvelé à chaque nouvel épisode au terme duquel triomphent la justice et le bien. C’est une double fiction alors à laquelle convie la série policière : celle d’un univers criminel exotique où s’exposent les passions humaines le plus crues, et celle d’un univers idéal où bien personnel et bien commun font figure de compas. Pourtant, le réalisme est l’aune à laquelle fréquemment on mesure la qualité d’une série policière. Dès lors, tiraillée entre fiction et réalisme, ordre et contestation, la série policière se déploie sur un large spectre esthétique et idéologique que l’ouvrage se propose de balayer, pour faire valoir la richesse d’un genre pluriforme. C’est ce balancement entre conservatisme et progressisme que l’ouvrage veut mettre en valeur, dans l’étude de séries tant mainstream que de niche, sans présupposés de popularité ou de qualité.