Dans la précédente livraison du Bollettino di Iasos , notre contribution essayait de mettre l’accent sur la production locale trouvée en Carie maritime à l’époque archaïque, et tentait succinctement de placer cette région sur la carte des traditions coroplastiques de cette époque en Méditerranée orientale en prenant appui sur la série des grandes figurines féminines. Bien entendu, le travail n’est qu’à peine entamé, et il faudra attendre la publication de corpus bien plus fournis et surtout contextualisés pour apporter une amélioration significative à l’état de nos connaissances . Deux points semblent toutefois assez distinctement établis : c’est la dette de la Carie à l’égard des régions voisines, d’une part Chypre et d’autre part l’Égée hellénique. Les deux dossiers qui suivent viennent manifestement confirmer cette dette. Le dossier des cavaliers chypriotes et celui des vases plastiques que nous présentons ici, en tout onze pièces, relèvent soit d’une importation soit d’une production locale avec des prototypes importés. La familiarité avec les productions exogènes est trop grande pour imaginer qu’il en fût différemment. Mais reconnaître cette dette est insuffisant, et il faut tenter d’aller plus loin pour comprendre les causes de cette dette ainsi que son environnement, son écosystème en quelque sorte, tant du point de vue des pratiques qui contribuent à amener ces objets là où ils ont été trouvés que celui des circuits d’échanges qui conditionnent ce transfert. De notre point de vue, il ne s’agit en aucun cas d’une sorte d’impérialisme culturel des régions susmentionnées (Grèce, Chypre) sur une Carie ‘arriérée’ ou même d’une ‘influence’ à laquelle, de toute manière, les savants ne savent généralement pas donner chair, et qui n’a jamais rien expliqué en termes historiques . Bien au contraire, il me semble que ces pièces donnent à voir l’intégration de la Carie, de sa façade maritime en tout cas, dans les flux d’échanges qui relient et font interagir des populations différentes dans cette zone comprise entre la péninsule d’Halicarnasse, celle de Cnide, et les grandes îles de Samos et de Rhodes. Par ailleurs, il faut garder à l’esprit que ces séries doivent être comprises en parallèle avec d’autres, bien plus locales, que nous aurons l’occasion de publier prochainement , sans compter celles qui attendent encore d’être découvertes. Même en se limitant à la production coroplastique d’époque archaïque, ces analyses montrent la complexité et la richesse de la situation historique de la Carie dans son rapport à la production et la consommation de ces petits artefacts servant essentiellement en contexte rituel (tombes, sanctuaires).