L'étude des connexions au sein de l'Empire islamique s'inscrit nécessairement dans un questionnement sur la cohésion de ce dernier, selon deux axes : les relations politiques qui favorisèrent ou mirent en péril l'unité de cette organisation ; la constitution de réseaux transrégionaux de toutes sortes qui donnèrent corps à l'Empire au-delà de la soumission commune au califat. Au sein de ce deuxième axe de recherche en plein développement, les sociétés musulmanes ont reçu l'essentiel de l'attention. Il est possible de l'expliquer, voire de le justifier, par la configuration du champ académique, par un régime documentaire plus favorable ou par le poids politique plus important de ces groupes sociaux ; toutefois, sans préjuger de l'importance de ce processus pour le devenir de l'Empire islamique, il est également légitime de se demander dans quelle mesure les sociétés soumises acquirent une conscience d'appartenir à un même ensemble et développèrent de nouvelles solidarités transrégionales. Nous nous poserons cette question en nous concentrant sur l'Église, institution centrale pour l'administration et l'encadrement des populations, dans les anciens territoires de l'Empire byzantin durant le premier siècle de l'Islam. Si l'intégration dans l'Empire islamique ouvrit la possibilité d'établir de nouvelles relations avec les chrétiens autrefois sous la tutelle sassanide, nous verrons que la tendance dominante fut celle d'une autonomisation régionale et confessionnelle.